• L’eau a une très riche symbolique qui peut se regrouper en trois thèmes principaux, intriqués bien entendu : source de vie, moyen de purification et moyen de régénérescence.

    1. L’eau, source de vie.

    Dans beaucoup de cosmogonies, l’eau est l’élément primordial et c’est dans la masse des eaux ou dans l’océan primordial que va apparaître la vie. Cette conception si ancienne et si répandue est en quelque sorte confirmée par les recherches scitifiques les plus récentes sur l’origine de l’évolution des espèces.

    Les anciens Mésopotamiens vont encore plus loin : ils parlent de l’eau originelle, pour eux, l’eau est à l’origine de l’univers. Pour les Egyptiens, le monde a surgi de l’eau à la création, et ils le croient d’autant plus que chaque année, lorsque se retire l’inondation du Nil, la terre d’Egypte émerge de l’eau pour une renaissance végétale. Pour eux, l’eau pure donne la vie et la véritable eau de vie est contenue par exemple dans les deux cruches rouges peintes sous le guéridon dans la scène où Khonsou se livre au jeu rituel des osselets, sur sa cuve funéraire exposée au Grand Palais à Paris en 1976.
    Une prière de l’Egypte ancienne contient ces mots : "L’eau est la concentration intérieure". Selon Pierre du Bourguet c’est une sentence symbolique dont l’origine résiderait dans les grosses noix, renfermant de l’eau, du palmier-doum, d’Egypte.
    Il a été fait allusion plus haut à l’eau originelle. Comme s’ils y croyaient à notre époque, les gens de certaines régions de l’Inde s’abordent en disant : "De quelle eau est-tu ?"

    Le règne végétal dépendant de l’eau, celle-ci est synonyme de fertilité et même de fécondité. C’est pourquoi la dernière des trois fonctions sociales décrites par Dumézil chez tous les peuples d’origine indo-européenne, celle de la production donc de la fécondité, s’exprime par des divinités relatives à l’eau, par exemple Ganga, le Gange, et Yamuna, le Jumma, son plus grand affluent de droite, dont les effigies anthropomorphes féminines sont souvent figurées sur les temples indiens dont elles encadrent volontiers le portail.

    La pluie et la neige qui descendent des cieux n’y retournent pas sans avoir abreuvé la terre, sans l’avoir fécondée et l’avoir fait germer pour donner le pain à celui qui mange, précise le livre d’Isaïe (LV, 1-11). L’eau est symbole de fertilité et même de fécondité de Mircea Eliade ajoute qu’elle a aussi une signification séminale, par exemple dans l’usage assez répandu d’arroser d’eau la charrue, pour le premier labour de l’année ; mais également "la pluie est fécondante, pareille au semen viril".
    Pour les Ligures, l’eau a encore une signification différente, se rattachant cependant à un symbolisme de fécondité.

    Une ligne brisée est l’hiéroglyphe égyptien signifiant l’eau et dans l’art ancien du Proche-Orient des lignes brisées ou ondulées symbolisent souvent l’eau. Par exemple, un grand vase d’albâtre, de l’époque de Djemdet-Nasr, c’est-à-dire datant de 5000 ans, trouvé à Uruk (Irak) porte une double ligne ondulée ; c’est un canal artificiel ou une rivière fertilisant les végétaux figurés sur le vase.

    EAU VIVE

    L’eau vive est une image qui revient souvent dans l’Ancien et le Nouveau Testament. Les Hébreux dans le désert, craignant de mourir de soif, récriminent contre Moïse ; celui-ci, sur l’ordre de Dieu frappe de son bâton le rocher du Mont Horeb et il en jaillit une source (Exode XVII,3-7). L’exégèse en fait un symbole de Dieu, source de vie. Cet épisode a été souvent représenté en peinture, en mosaïque, en miniature, voire en sculpture. Dans le Psaume 36, David dit à Yahwé : "En toi est la source de vie’". A la Samaritaine, Jésus dit : "Qui boira de l’eau que je lui donnerai n’aura plus jamais soif : cette eau deviendra en lui soource d’eau jaillassant en vie éternelle" (Jean, IV,14). Le dernier jour de la fête des Tentes, à Jérusalem, "Jésus lance à pleine voix : "Si quelqu’un à soif, qu’il vienne à moi et qu’il voive, celui qui croit en moi". Selon le mot de l’Ecriture : de son coeur couleront des fleuves d’eau vive. Il parlait de l’Esprit que devaient recevoir ceux qui croien en lui". (Jean, VII, 37-39).

    Dans l’Apocalypse, Jean entend les paroles suivantes : "Celui qui a soif, je lui donnerai la source de vie, gratuitement" (AP.XXI,6). Un peu plus loin il nous décrit le fleuve de Vie qui jaillissait du trône de Dieu et de l’Agneau (Ap. XXII, 1).
    A côté du thème du puits qui dans le Judaïsme tenait une grande place - le puits c’était la Loi - l’eau vive dans le Nouveau Testament est d’abord l’enseignement de Jésus, sa parole, ensuite et surtout c’est le symbole de l’Esprit-Saint.

    La source d’eau vive des chrétiens ou Fontaine de Vie, terme français utilisé à partir du XIIIe siècle, a été l’objet de très nombreuses illustrations ; accompagnée généralement de deux cerfs (cf. le Symbolisme du cerf), ou d’une biche, conformément au Psaume XLII, elle figure sur les mosaïques qui décorent les baptistères paléo-chrétiens d’Europe, de la Proche Asie et de l’Afrique du Nord, mosaïques soit en place, soit transportées dansles musées. Moins souvent elle figure sur des bas-reliefs comme dans la crypte de St Jacques-de-Compostelle, ou sur des oeuvres en métal (or, argent, cuivre) ou sur des fresques. Elle orne également des manuscrits, dont les plus célèbres sont l’Evangéliaire de Soissons, de 827 - où la Fontaine de Vie est représentéee sous forme d’un nymphée antique, en perspective inversée - et l’Evangéliaire de Godescalc (Bibliohèque Nationale), commandé au personnage de ce nom par Charlemagne pour commémorer le baptême de son fils Pépin par le Pape en 781. Charles y fit placer en frontispice une image de la Fontaine de vie, s’échappant de la Croix, source mystique, disposée dans un décor paradisaique habité par des oiseaux et par un cerf. "La Fontaine de Vie symbolise d’une manière générale les Evangiles qui représentent l’eau de la Vie Eternelle.

    Nous rattacherons au symbolisme de l’eau vive celui qui s’exprime dans une des pricipales oeuvres du Musée de Calcutta, la première douche du futur Bouddha, bébé, mais déjà auréolé, reçoit d’un vase rituel, une aspersion d’eau pour indiquer qu’il connaîtra l’illumination. Une des sculptures les plus célèbres de l’Inde, de l’ar de Mahabalipuram, du VIIe siècle, représente la descente de Ganga, taillée à même le roc, illustrant un récit mythique dans lequel un titan a dévoré la partie de la terre où se trouve la source du Gange, source primordiale. L’Inde manque d’eau. Shiva sollicité accepte de faire descendre à nouveau le fleuve, mais pour modérer cette énorme masse d’eau qui tomberait avec une force excessive, le dieu lui-même, avec son chaperon de cobras, reçoit l’eau, comme on le voit, dans la fissure centrale du granit. C’est un symbole de l’énergie distribuée à toutes les créatures par Shiva.

    2. L’eau, moyen de purification

    L’eau purifie, c’est reconnu universellement ; et dans presque toutes les cultures, elle sert à des purifications rituelles. Dans l’Inde et l’Insulinde, il est procédé solennellement, lors du nouvel an, à l’ablution des statues de culte et des fidèles.
    En Egypte, au moins à la basse époque, les prêtres se lavaient dans un lac sacré avant l’aurore, se purifiant ainsi le corps, puis ils faisaient le tour du temple versant l’eau et faisant brûler l’encens. Les portes du sanctuaire étaient ouvertes au moment où se levait le soleil ; la statue du dieu était alors déshabillée et lavée avant d’être à nouveau parée et tenue enfermée jusqu’au lendemain matin.

    Le bain sacré des statues est connu dans le culte de divinités féminines phéniciennes, crétoises et même de déesses grecques : bain d’Aphrodite à Paphos, signalé dans l’Odyssée, bain d’Athéna chanté par Callimaque. Ce rituel se pratiquait surtout pour les grandes déesses, Cybèle notamment, avec en outre l’espoir d’obtenir la pluie et une heureuse décondité.
    En Mésopotamie et dans l’Asie Occidentale ancienne, le prêtre pratiquait des lustrations pour laver de sa faute le pécheur ; et les occasions deveaient être fréquentes puisque les maladies étaient considérées comme les conséquences des péchés.
    Pour les Hébreux, l’eau purifie les impurs ; ils vénéraient une "eau sacrée" est lors de la fête des tabernacles, procédaient durant sept jours à des libations d’eau, utilisant parfois des bouteillles en or.

    Dans le Christianisme, l’eau purifie les péchés lors du baptême.

    Les Arabes, avant même Mahomet, vénéraient le puits Zam-Zam. L’eau est aussi symbole de pureté dans l’Islam, qui insiste sur les ablutions rituelles auxquelles le fidèle doit procéder avant chacune des cinq prières quotidiennes. Les mosquées possèdent une fontaine permettant ces ablutions et qui est souvent la principale source d’eau de la ville. La prière est comme une rivière d’eau douce, dit Mahomet ; l’eau est sacrée et associée à la religion dans les pays musulmans, qui sont arides. Il en est de même dans tous les pays où l’eau est rare ; dans le Mexique pré-colombien par exemple, le dieu de la pluie est un des plus grands dieux et son masque y orne, à un très grand nombre d’exemplaires, presque tous les monuments. C’est alors surtout la fonction de fertilité qui est en jeu. Mais c’est une purification de la mère et de l’enfant qui était de mise après l’accouchement chez les Aztèques dans le bain de vapeurs d’eau.

    Des purifications, éventuellement périodiques, sont exigées des femmes dans diverses cultures. Dans des pays d’Extrême-Orient où le riz est la base de la nourriture, les rites de repiquage du riz sont associés à la purification des femmes préposées à ce travail : elles doivent être pures pour que le riz pousse bien.
    La symbolique de purification se retrouve aussi à l’époque moderne parmi les rites de la Franc-Maçonnerie : les mains du candidat sont plongées dans l’eau.

    A tous ces symbolismes s’oppose bien entendu celui de la vase et de la boue.

    3. L’eau symbole de renaissance, de régénérescence.

    Dans l’Inde brahmanique, lors de la cérémonie du mariage, le mari reverse dans les mains de l’épouse, l’eau qu’un brahmane a versée dans les siennes ; un rite identique est observé par le maître à l’égard de l’élève lors de l’initiation du jeune garçon : c’est pour lui une seconde naissance, la naissance à la société.
    Le cortège nuptial aux célèbres Daïdala de Béotie conduisait Héra vers Zeux. Pour chacune de ces unions renouvelées, l’épouse divine retrouvait sa virginité, par la vertu de quelque source ou d’un fleuve ; cette rénovation était commémorés par le bain rituel de sa statue à Platée, à Nauplie, à Samos.

    Les sources.

    Chez tous les peuples d’Europe et en maints autres pays, les sources ont été l’objet d’un culte depuis les temps les plus reculés jusqu’à une époque récente, voire jusqu’à aujourd’hui.
    Certes l’eau en général - et la source en particulier - était une divinité génératrice de vie et de fécondité, et à ce titre était chez les Celtes la déesse-mère par excellence. Mais certaines sources, relativement nombreuses en Gaule par exemple, étaient douées d’un pouvoir de régénérescence ; les sanctuaires de ces sources attiraient pèlerins et malades qui y déposaient des ex-voto de bois, de pierre ou de bronze, pouvant représenter soit un personnage, soit l’organe malade, oeil, membre, sein, organes génitaux, etc.

    Ces sanctuaires de sources étaient souvent dédiés à des déesses-mères, matrae ou matronae (source de la Marne par exemple), ou bien à une déesse guérisseuse telle Damona ou Sirona, ou encore au dieu Borvo d’où la fréquence des toponymes du type Bourbon, Bourbonne pour désigner les villes actuelles dont les sources thermales sont utilisées de nos jours et l’étaient déjà à l’époque gallo-romaine.

    Le serpent symbolisant les forces souterraines donc celles qui permettent aux sources de jaillir, réalise l’union entre la terre et l’eau bienfaisante ; il accompagne volontiers la déesse guérisseuse, comme il accompagnait le dieu-médecin Esculape.
    Parmi les temples de source romains un des plus admirables et des mieux conservés est celui de nemausus, à Nimes, dit Temple de Diane. Un des plus importants est celui de Zaghouan, en Tunisie, d’où partait l’aqueduc du même nom pour alimenter la Carthage romaine.

    Les divinités locales, gauloises ou autres, ont, dans l’ère romaine, reçu secondairement des noms de dieux romains, auxquels elles ont été assimilées. Plus tard encore, des sources ou des fontaines ont été christianisées et didiées à un saint, l’Eglise ne parvenant pas malgré les interdictions prononcées par les évêques et les conciles, à faire cesser le culte des sources, tant il était ancré dans l’esprit populaire. C’est dans la partie de la France demeurés la plus celtique, la Bretagne armoricaine, que les rites anciens de l’eau sont aujourd’hui les meiux conservés ; des fontaines ont le pouvoir de guérir, notamment les yeux malades, à côté de chapelles placées sous le vocable évocateur de Notre Dame de la Clarté.

    Non seulement les sources, mais aussi les fleuves et les rivières, étaient souvent divinisés. Le Nil est une divinité pour les Egyptiens de même que le Tigre et l’Euphrate pour les Babyloniens. Ceux-ci adoraient une triade divine, Anu, Enlil et Ea. Ea, appelé EnKi en Sumérien, domine sur les eaux de l’Océan primordial ; il a deux filles, Nina, déesse des eaux dont l’idéogramme est un poisson dans un bassin, et Nisaba qui tient un vase jaillissant, symbole de la propérité dont elle est la dispensatrice. De telles divinités aux eaux jaillissantes sont présentes dans la statuaire et sur les sceaux-cylindres.

    En Inde, une quantité innombrable de représentations anthropomorphes de rivières figure sur les temples. Elles sont féminines et en tant qu’épouses de l’océan, elles se précipitent vers lui dans leur empressement à rencontrer leur bien-aimé. L’océan, masculin, seigneur des cours d’eau, est rarement représenté, au contraire de la déesse Ganga, un des thèmes les plus importants des textes sacrés, qui figure sur presque tous les temples, y compris ceux de l’Inde du Sud, pourtant à beaucoup plus de mille km du Gange. Le plus souvent, elle porte un vase plein d’eau, les autres rivières aussi. Les confluents sont fortement chargés de sacré dans le monde indien.

    Plus à l’ouest, on renconte des dieux fluviaux hellènes à forme humaine (masculine) ou plus souvent taurine, et des dieux de sexe différent, qui préexistaient à la civilisation grecque. Là elles sont divinités de la naissance, elles élèvent des enfants qui deviennent des héros.

    La mer aussi est divinisée sous le nom de Poséidon, de Neptune chez les Grecs et les Romains ; ce grand dieu a des acolytes qui n’ont pas accès à l’Olympe, Triton, Protée, Nérée, au buste anthropomorphe, au corps monstrueux serpentiforme, à queue de poisson. Ces divinités, objets de tant de représentations antiques, et même classiques, sont parfois plus souvent maléfiques comme la mre. Il n’es est pas de même des gracieuses nymphes marines, Néréides, Océanides qui, souvent montées en amazones sur des monstres marins, constituent le cortège nuptial de Thétis et Pélée, dans l’art grec, motif particulièrement aimé des peintres de vases, ou qui, sur les mêmes montures, suivent Thétis venant voir son fils Achille comme sur une mosaïque de galets, provenant de la villa de la Bonne Fortune à Olynthe (Grèce). Quoique marines, toutes ces divinités se retrouvent scupltées, en bas-reliefs, sur des temples de source gallo-romains, très éloignésq des côtes.

    La coutume était répendue de jeter dans la source ou la rivière une offrande ou une pièce de monnaie pour se concilier la divinité qui y résidait. Présentement la coutume n’a pas complétement disparu. De nos jours des Noirs jettent dans les rivières d’Afrique des offrandes, poignée de blé, de grains ou de café : c’est plutôt pour apaiser les esprits malfaisants qui, à leurs yeux, peuplent ces rivières.

    Le caractère prophétique de l’eau appartient au fond commun de l’humanité et vient de ce que l’eau de la source est en communication avec le monde infernal. La Pythie et les prêtres grescs doués du don de prophétie se préparaient à leur rôle en buvant l’eau d’une fontaine.

    4. Autres symbolismes de l’eau.

    Les rythmes des marées suivent les cycles de la lune et contribuent à donner à l’univers une structure cyclique. Tous les rythmes aquatiques sont orchestrés par le même destin que les rythmes lunaires, écrit Eliade ; il insiste longuement sur le fait que l’eau est comparée ou directement assimilée à la lune, et que l’ensemble eau, lune et femme a été perçu comme le circuit anthrophcosmique de la fécondité, et ce, depuis fort longtemps, dès la préhistoire. La spirale, l’escargot, la femme, l’eau, le poisso, appartiennent constitutionellement au même symbolisme de fécondité.

    L’usage funéraire de l’eau s’explique par le même ensemble qui valide ses fonctions cosmogonique, magique et thérapeutique. Dans les pays secs du Proche-Orient et de l’Afrique du Nord a régné la crainte de souffrir de la soit après la mort : c’est là surtout qu’on pratiquait des libations pour les défunts, dans le but principalement d’apaiser le mort qui xonservait, croyait-on, un mode élémentaire d’existence, et même d’abolir définitivement de le solidariser avec les semences, de lui donner la faculté d’acquérir une nouvelle naissance.

    En Chine, l’eau est Yin, principe féminin ; elle symbolise l’hiver et correspond au Nord, au froid, aux reins, à la couleur nore, à la mort. Le monde souterrain des eaux est le pays des morts ; les libations leur parvenaient quand on les versait sur le sol en terre battue des maisons à une époque où les morts étaient enterré dans les maisons et non encore dans des cimetières.
    C’est un autre symbolisme de l’eau qui apparaît dans le code de Hammourabi (XIXe siècle avant notre ère) : l’inculpé de sorcellerie, en Babylonie, doit se précipiter dans le dieu-fleuve qui fera éclater son innocence ou sa culpabilité. Le Moyen Age ignorait cet antécédent quand il a repris ce mode de jugement. Des traces de l’ordalie par l’eau ont survécu jusqu’à aujourd’hui, selon Eliade, dans les croyances et le folklore sardes.

    La mer a souvent une symbolique funeste, tant chez les païens que chez les Hébreux et les chrétiens. La mer en généralsymbolise les forces chaotiques du monde, le mal, la puissance dénmoniaque. La psychanalyse, au contraire, rapproche la mer de toute une série d’éléments, terre, grotte, nuit, lune, eau et a tendance à voir en eux un archétype de la mère. Selon Marie Bonaparte, la mer est pour tous les hommes l’un des plus grands, des plus constants symboles maternels.. ; nous aimons la mer parce que quelque chose de nous trouve à se réincarner, quelque chose issu de nos amours d’enfance, qui n’allaient d’abord qu’à la créature-abri, la créature-nourrice que fut la mère. G. Bachelard en rapproche une phrase d’un hymne védique : "Les eaux qui sont nos mères" et une autre de Michelet : "Le poisson... nourri....au sein de la mère commune". Pour Bachelard, tout liquide est une eau, toute eau est un lait..., la mer est maternelle, l’eau est un lait prodigieux.
    Dans les hymnes orphiques, l’Océan est invoqué comme la fin de la terre et le commencement du Ciel. Les Pythagoriciens font de l’Océan le passage des âmes humaines vers les Ilse des Bienheureux, soleil et lune. L’Océan est symbolisé soit par le dieu Océan sur des mosaïques, soit surtout par des Tritons et des Néréïdes sur d’innombrables sarcophages romains évoquant la grande traversée.


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  • Depuis les recherches antiques et surtout celles des Stoïciens, la philosophie occidentale admet l’existence de 4 éléments de base pour la formation du monde : le feu, l’air, l’eau, la terre ; et le plus souvent, elle accorde, comme eux, une place éminente au feu. Pour les Stoïciens, le feu dans la nature est doué de puissance créatrice ; ils donnent, par l’intermédiaire d’un des leurs, Balbus, que Cicéron fait parler dans son "De natura deorum", une explication du monde où les éléments sont maintenus dans une cohésion parfaite grâce à l’esprit divin qui pénètre partout ; une sorte d’osmose existe entre les quatre éléments.

    Ce concept des quatre éléments a été repris par un très grand nombre d’auteurs non seulement au Moyen Age mais depuis Pline l’Ancien jusqu’au XIXe siècle où le théosophe Baader, contemporain de Goethe, reconnaît deux forces qu’il appelle eau et feu ; il affirme la nécessité d’en admettre une troisième, servant de point d’appui, la terre ; chaque élément forme le côté d’un triangle ; on revêt celui-ci d’un point en son centre symbolisant le principe actif qui anime tout, le principe air qui appuie sur le levier. On dirait aujourd’hui que l’auteur a construit un yantra.

    Au XIIe siècle Honoriau d’Autun précise la parenté de l’homme avec les éléments. Au XVIe siècle, Christopher Marlowe dit dans un de ses poèmes : "La nature qui nous a formés de quatre éléments...". Au XVIe encore, Paracelse appelle salamandre l’être élémentaire habitant le feu, gnomes ceux de la terre, sylphes ceux de l’air et ondines, de l’eau. En d’autres cas, si la salamandre symbolise le feu, c’est la taupe qui symbolise la terre, l’oiseau l’air et un poisson l’eau.
    Le symbolisme de chacun des quatre éléments sera étudié séparément tant il joue un rôle important dans l’art, les religions et la vie quotidienne, mais disons d’emblée :

    - le feu éclaire et chauffe, c’est un élément de la puissance de l’homme et de sa supériorité sur le monde animal, mais qui peut se retourner contre lui : le feu brûle. Il est en rapport avec le soleil.
    - l’eau purifie : elle est en outre source de vie ou de régénérescence, d’où le culte des sources si répandu et de nombreux rites dans presque toutes les religions.
    - l’air est l’élément céleste, d’où le concept d’élévation dans la démarche spirituelle.
    - la terre est symbole de fertilité et même de fécondité. Elle a des rapprots avec la naissance et la mort. Le serpent est symbole de cette dualité.
    Aujourd’hui la pâte que fait lever le boulanger est une matière à trois éléments :
    - la terre qui donne le grain de blé
    - l’eau (il entre encore plus d’eau que de farine dans la confection du pain)
    - l’air ; et la pâte attend le quatrième élément, le feu. Celui qui connaît ces faits comprend qce qui est né dans l’eau s’achève dans le feu et que cela s’applique aussi bien à la pâte du potier qu’à celle du boulanger.

    Souvent les quatre éléments sont groupés en deux paires d’éléments opposés : le feu et l’eau, l’air et la terre. Le feu est masculin, l’eau est féminine ou bien a un symbolisme féminin quasi universel. Malgré la très forte opposition entre le feu et l’eau, leur symbolisme est souvent associé, des exemples en seront donnés ; ici nous citerons seulement le tableau de Charles Dulac, peintre symboliste (1865-1898), tableau intitulé "L’eau et le feu", représentant une barque sur l’eau, barque portant une cabine éclairée et d’où sort un tuyau de cheminée. Une grande atmosphère de calme se dégage de la toile.
    L’air et la terre forment également un couple de contraires. On a déjà vu leur association dans l’espace et dans le temps, y compris à l’époque présente, sous la forme du combat de l’aigle et du serpent - leurs symboles respectifs- combat doué d’une haute valeur suggestive, étudié plus haut.

    Les quatre éléments étaient groupé différemment par les Néo-Pythagoriciens : air et feu, terre et eau. L’air et le feu ont tendance à s’élever et appartiennent à l’hémisphère du haut, le monde de la monade, qui est masculin et bienfaisant. La terre et l’eau, que la densité fait descendre, appartiennent à la dyade et à l’hémisphère du bas, féminine et malfaisante. Le premier de ces deux groupes commande et dans une certaine mesure, symbolise la lumière, la vie, la justice : le second préside à l’obscurité, la mort et l’injustice.

    Suivant Macrobe, dans la distribution que fit Jupiter des éléments à plusieurs divinités, Apollon fut chargé de prendre soin du feu, Phébé de la terre, Vénus de l’air et Mercure de l’eau, aussi regarde-t-on ce dieux comme l’inventeur de la clepsydre.

    La théorie des quatres élémentsn’est pas l’apanage exclusif des Occidentaux : elle existe chez d’autres peuples, par exemple dans la peuplade noire Ehvé qui distingue, dans l’ordre d’importance décroissante, l’air, le feu, l’eau, la terre, alors que le feu avait généralement la place prééminente jusqu’ici ; et cependant, cette ethnie admet deux couples d’éléments en relation d’opposition déjà vus : l’air et la terre, le feu et l’eau (Néron de Surgy).

    Pour les Aztèques, les quatre éléments représentés par quatre divinités de leur panthéon, étaient l’eau, le vent, le soleil, et la terre. Les différences avec les nôtres ne sont qu’apparentes si l’on remarque que l’air est décrivent en outre quatre âges du monde, le premier âge, celui du "Soleil de l’Eau" au cours duquel le dieu suprême créa le monde, le secon, celui du "Soleil de la Terre", le troisième le "Soleil du Vent" et le quatrième, l’âge actuel, est celui du "Soleil du Feu".

    En Inde, cinq éléments, terre, feu, air, eau et éther (souffle) sont à la base de la construction des temples hindouistes. Dans la tradtions indienne, le corps humain contient les cinq éléments de l’univers et est un microcosme, en harmonie avec le macrocosme.

    En Chine, où le symbolisme du chiffre 5 est important, on décrit non pas quatre, mais cinq éléments :
    - l’eau qui symbolise l’hiver et correspond au Nord
    - le feu qui symbolise l’été et correspond au Sud
    - le bois qui symbolise le printemps et correspond à l’Est
    - le métal qui symbolise l’automne et correspond à l’Ouest
    - la terre qui correspond au centre.

    Dans cet ordre, les éléments sont affectés d’un chiffre de 1 à 5, sauf dans des textes d’alchimie taoïste où le feu est affecté au chiffre 1 et l’eau au nombre 2, car, précisent-ils, l’élément feu anime notre coeur, et l’élément eau réside dans les reins, or le viscère du feu, le coeur, est unique, et les viscères de l’eau, les reins, sont deux. La vision intérieure des Taoïstes consiste à se purifier et à chercher à recréer l’unité primordiale par l’union antithétique de cette eau et de ce feu dans notre corps.
    Le feu et le bois sont des éléments Yang, symbolisés par le Dragon dans un courant taoïste Neitan qui s’inspire de l’alchimie chinoise. Le métal et l’eau sont des éléments Yin, symbolisés par le Tigre, "Ces deux bêtes doivent être unies en une hiérogamie difficile à réaliser ; il faut recourir aux offices de l’entremetteuse, le cinquième élément, terre." En outre, le feu correspond au côté gauche et à la vie, l’eau au côté droit et à la mort.

    En Occident aussi, il est parfois question d’un cinquième élément, surtout dans l’alchimie qui élabore la notion de quintessence ou cinquième élément, semence qui permet d’engendrer, de maintenir, de détruire et d’engendrer de nouveau.


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