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    Le noir couleur de nuit est ambivalent par essence. Il y a deux noirs : le noir aérien, nocturne, intermittent, relatif, remanié par les étoiles et la lune, et le noir souterrain, permanent, absolu, qui ne peut être effacé que par la lumière artificielle. Nos lointains ancêtres étaient confrontés à ces deux composantes.

    Le noir correspond à l’absence de lumière, donc de couleurs. Les ténèbres correspondent au néant, au gouffre noir. Il est opposé au blanc comme sa contre-couleur. Dans la palette chromatique, selon qu’il est brillant ou mat, il est la somme ou l’absence de couleurs, leur synthèse ou leur négation.

    Il est froid, correspondant aux ténèbres primordiales.

    Il est instable au-dessous du monde = le monde souterrain est noir.

    Il est donc associé à la mort, d’où les vêtements de deuil - et au renoncement à la vanité du monde, d’où les

    manteaux noirs dans les costumes religieux chrétiens et musulmans (imam ... ), à l’Humanité et à la Respectabilité (magistrats, professeurs).

    Dans le symbolisme indien, il est la pureté originelle : l’immortel Krishna est noir tandis que le mortel Arjuna est blanc, c’est le soi universel opposé au moi individuel.

    Dans toutes les religions, il indique la mort = l’obscurité de nos origines, l’obscurité du retour à la terre matricielle et nourricière. Les Chinois l’associent au Yin féminin, terrestre, instructif, maternel. Plusieurs déesses mères sont noires : Diane d’Éphèse, Isis, Kali hindoue. Il existe de nombreuses vierges noires illustrant la moisson mariale française. Sur le Mont Palatin la Magna Mater était noire ainsi que la Ka’ba de la Mecque. C’est le symbolisme originel. Il est à la fois commencement et fin. Chez les mystiques musulmans les étapes de la progression des Soufis vers la béatitude sont colorées et aboutissent au noir brillant précédant l’extase suprême ou l’éblouissement.

    Le noir brillant et chaud des peintres est issu du rouge, le charbon noir provient aussi du tison rouge du feu. Curieusement en héraldique le noir se nomme sable indiquant la terre stérile, jaune, ocre. Le noir est lié à l’inconscience (être noir) et la malveillance (noirs desseins, âme noire, bête noire, avoir l’oeil noir ... ) mais il génère la mélancolie et le pessimisme : idées noires, broyer du noir, humeur noire...

    Les Romains marquaient d’une pierre noire les jours "néfastes" et les écoliers anglais appellent le lundi de la rentrée des classes black munday...

    Le noir est "le symbole de tout ce qui est mal et de tout ce qui est faux" mais une perle noire porte bonheur...

    Il est classiquement opposé au blanc.

    Il est aussi opposé au rouge = cartes noires : pique maléfique - trèfle bénéfique / carte rouge : coeur bénéfique - carreau maléfique.

    Notons comme tous les médecins que les médicaments ont rarement une apparence noire, des dragées noires seraient perçues comme de mauvais augure...

     


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  • Le blanc est dans l’atmosphère la somme des couleurs, car son irisation donne l’arc-en-ciel.

    Il est diurne, mais c’est une couleur de passage

    • passage du matin à l’Est avec l’aube
    • passage du soir à l’Ouest avec le couchant.

    Le blanc du matin monte de la matité à la brillance, le blanc du soir descend de la brillance à la matité, mais les deux sont vides, "suspendus entre absence et présence, entre lune et soleil, entre les deux faces du sacré". Toute naissance est donc renaissance : c’est le cycle nycthéméral de la vie.

    Le blanc est donc couleur de deuil à la cour de France jusqu’à la fin du XVIE siècle.

    C’est la couleur de la pureté, donc de la virginité (la mariée est vêtue de blanc), donc aussi de l’innocence (l’enfant que l’on baptise est vêtu de blanc). De même pour les enterrements, les enfants sont conduits en terre sous un suaire blanc orné de fleurs blanches. Les religieuses novices sont habillées en blanc. Cette notion de passage et d’au-delà conduit les prêtres à se vêtir de blanc. Le pape porte des vêtements blancs. La pureté prend la couleur immaculée : c’est la Vierge de l’immaculée Conception vêtue de blanc. Jésus apparaît aux disciples vêtu de blanc.

    Le blanc est aussi le secret correspondant à la lumière intérieure chez les Soufis, se rattachant au for intérieur de l’être représenté par Moïse.

    Le blanc représente aussi la sagesse, il s’identifie avec la lumière intérieure dans beaucoup de religions.

    L’opposition au rouge définit l’homme dans sa dualité terrestre et céleste.

    Par contre le combat avec le Nord explique les frontières "éthérées".

    Sous cet aspect il peut être maléfique et inconsistant (voter blanc), mais la plupart du temps il signifie heureux et candide (candida = blanc) ; un candidat est donc par définition (?) quelqu’un d’heureux et d’immaculé...

    Le côté maléfique du blanc est donc relatif au deuil ancien, alors que les animaux blancs étaient réservés aux sacrifices : moutons, taureaux, colombes... L’éléphant blanc est sacré en Thaïlande et réservé au roi.

    Il faut différencier le blanc du blanc-gris lié à la peur (livide) ou du blanc-jaune de la maladie.

    Le blanc, couleur de l’innocence et de la pureté, est réputé porter chance. Naguère les enfants royaux étaient habillés de blanc pendant leur petite enfance (jusqu’à 7 ans).


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  • Le violet est la couleur de la tempérance. Mélange de bleu et de rouge, il associe action réfléchie et lucidité, équilibre entre le ciel et la terre, le sens et l’esprit, la passion et l’intelligence, J’amour et la sagesse.

    La carte du Tarot nommée "la Tempérance" tient dans ses mains un vase bleu et un vase rouge entre lesquels s’échange un fluide incolore : l’eau vitale, échange perpétuel entre le rouge chtonien et la force impulsive du bleu céleste. Par le jeu éternel des énergies de la matière, elle représente l’éternel recommencement.

    C’est une couleur d’apaisement et comme telle couleur de la robe des évêques qui doivent tempérer les passions de leur troupeau.

    C’est la couleur du secret, elle correspond à l’involution : passage de la vie à la mort (par opposition au vert qui est l’évolution) ; d’où la robe violette du Christ pendant la Passion et les vêtements liturgiques violets pour les enterrements.

    C’est la couleur du deuil et du demi-deuil. Il est associé aux martyrs.

    En Grèce le manteau d’Apollon était bleu-violet.

    C’est aussi la couleur de l’obéissance et de la soumission. La bague de l’évêque que baisent ses ouailles est une améthyste. En France, pour rendre les enfants obéissants, on attachait à leur cou une pierre violette qui les protégeait aussi des maladies. C’est une couleur de prudence pour les mêmes croyances.

    A cela s’ajoute une connotation négative d’ambiguïté, de tristesse, de mélancolie. La violette est une fleur funéraire : dans l’antiquité Proserpine en cueillait quand elle fut envoyée aux enfers. Si dans certaines campagnes elle est maléfique, elle est considérée surtout comme symbole de modestie. En Belgique elle sert même de philtre d’amour et son parfum donne le don de divination.

    Ainsi rejoint-on l’Extrême-Orient qui attribue au violet une signification dynamique : c’est la couleur du passage du Yang au Yin, de l’actif au passif. "Dans les rites tantriques, les accouplements rituels entre yogis se font dans une chambre éclairée d’une lumière violacée parce que la lumière violette stimule les glandes sexuelles de la femme alors que le rouge active celles de l’homme".


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  • Couleur du Feu et du Sang, le rouge est "considéré comme un symbole fondamental du principe de vie avec sa force, son éclat, sa puissance".

    Étant l’attribut de Mars, dieu de la guerre, c’est une couleur masculine, donc brûlante et violente. Elle est

    "débordante d’une vie ardente et agitée". Van Gogh écrit : "j’ai tenté d’exprimer les terribles passions humaines par le rouge et le vert".

    En Égypte c’est la couleur de Seth et de ce qui est maudit et nuisible. Les scribes écrivaient en rouge les notes de mauvais augure.

    En Grèce elle représente "l’amour sanctificateur", mais aussi l’innocence et la virginité.

    En Inde ancienne Vishnu qui représente l’amour divin était habillé de pourpre.

    A Rome, les généraux, les patriciens et empereurs étaient vêtus de rouge. Le manteau des centurions, comme celui de Saint Martin, était rouge.

    De même à Constantinople le code de Justinien condamnait tout vendeur ou acheteur de tissu pourpre, réservé aux empereurs.

    Pour le couronnement les rois portaient souvent le manteau rouge pourpre.

    Au Moyen Age le Christ fût souvent représenté vêtu de rouge comme les prêtres ; il en reste la robe des cardinaux, la "capa magna". En pratique, actuellement, les cardinaux ont simplement une ceinture rouge en dehors des grandes cérémonies.

    Le rouge, couleur du feu et du sang, est (pour l’Église catholique) couleur de l’Esprit, "à cause des flammes de la Pentecôte".

    L’ambivalence est permanente avec cette couleur : le rouge éclatant centrifuge est diurne, mâle, tonique, incitant à l’action.... le rouge sombre tout au contraire nocturne, femelle, secret et à la limite centripète. L’un entraîne, encourage, provoque, c’est le rouge des drapeaux, des enseignes, des affiches publicitaires... L’autre alerte, retient, incite à la vigilance et à la limite, inquiète : c’est le rouge des feux de circulation, la lampe rouge interdisant l’entrée d’un bloc radiologique, ou opératoire, d’un studio photographique... C’est le signal de marche de tous les appareils ménagers et autres, et le signal d’alerte du dysfonctionnement...

    La culture de la garance, plante qui sert à teindre les draps en rouge, a eu une importance essentielle au Moyen Age et encore au début du XXe siècle. Le poids des élus du midi et l’agitation sociale motivèrent le choix par le gouvernement français, pour l’uniforme militaire, de pantalons rouges de sinistre mémoire, signant l’insouciance politique. Mais au Japon les conscrits portent une ceinture rouge le jour de leur départ en symbole de leur fidélité à la patrie.

    En Chine et au Japon le rouge est bénéfique, donneur de vie ; il éloigne les démons, d’où les portes des enceintes des temples shintoïstes et des portes d’entrée des maisons, ainsi que des palanquins transportant les jeunes mariés. Un ruban rouge autour du poignet porte chance et protège des mauvais esprits. Autour d’une patte il protège les vaches du sorcier, les poules du renard... De même pour la maladie au Moyen Age un ruban rouge autour du cou protégeait de la peste. Au Pays de Galles la flammèche rouge protège de la fièvre et des rhumatismes. La ceinture des zouaves a la même explication.

    Le rouge est matriciel : la mer Rouge relève de ce symbole, représentant le ventre où mort et vie se transmettent l’une et l’autre. Pour les alchimistes d’ailleurs, la régénération, "l’oeuvre rouge", produit l’homme universel. C’est la couleur de la science, de la connaissance ésotérique.

    En héraldique rouge "de gueule" se rapporte d’abord à la férocité et au combat, au courage que la couleur de la Légion d’honneur, reprenant la croix de Saint Louis, officialise.

    L’ambivalence existe dans toutes les civilisations : le feu brûle, éclaire, brille, réchauffe, protège.


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  • L’orange symbolise le point d’équilibre de l’esprit et de la libido, à mi-chemin entre le rouge et le jaune donc entre la raison et la tempérance.

    Si l’équilibre tend à se rompre vers le jaune, il y a révélation de l’amour divin.

    C’est à cette conception que se rattachent la robe safranée des moines bouddhistes et la croix orangée des chevaliers du Saint Esprit. Le voile des fiancés, le flammuneum, est " l’emblème de la perpétuité du mariage ". Les muses étaient vêtues de safran, comme le voile d’Hélène.

    L’orange symbolise aussi la fidélité.

    Mais dans son déséquilibre vers le rouge elle indique infidélité et luxure. Dyonisos était vêtu d’orange ; "né du feu (Zeus), il fut élevé par la pluie" (Nymphas Hyades que Zeus remercia en les transformant en étoiles qui amènent la pluie). Son culte débridé correspond à l’ivresse provoquée par le vin ou rouge ou "blanc"- aune, dans le cadre d’une orgie rituelle, mais en vue de la recherche divine "puisque l’âme est incorruptible et immortelle".

    Dans son traité de l’Homme Parfait (Insan-ul-Kâmi) Jili décrit 7 cieux, puis 7 limbes de la terre dont la Terre de la nature, couleur jaune safran, habitée par les Jins incroyants.

    L’orange signifie l’union de l’homme à Dieu, "symbole des noces mystiques", mais paradoxalement le jaune et l’orange sont l’attribut des maris trompés...

    Toujours ambivalent, l’orange chez les Anglo-saxons indique la santé et l’émotion.


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