• Les "petits esprits", vivant dans l’eau, étaient déjà connus des habitants de l’ancien Dahomey sous le règne d’Akaba (1685-1708). Si on ne les vénérait pas, c’est en raison de la crainte que leur brutalité sauvage inspirait au souverain. Succédant à Akaba, Agaja (1708-1732) continua à les ignorer, ce qui lui valut une terrible et cruelle vengeance. Au cours d’une attaque des troupes royales, les "petits esprits" firent leur appartition sur le champ de bataile et anéantirent d’un seul coup toute l’armée d’Oyo.
    Cependant, Agaja persista à refuser de leur consacrer un culte, l’héritier du trône, son fils Tegbesu (1732-1774), également.

    Pour se rappeler à son bon souvenir, les "petits esprits" lui envoyèrent alors une chauve-souris transpotant sour ses ailes une feuille enflammée. Parvenue au-dessus d’Abomey, la chauve-sours laissa tomber la feuille, mettant ainsi le feu à toute la cité.

    Tegbesu prit la fuite. Mais les "petits esprits", les toxosu le suivirent jusqu’à Kana, où le prince, croyant être enfin en sécurité et avoir trouvé un asile, voulut établir une nouvelle capitale.

    Voyant qu’il ne pouvait leur échapper, il s’en retourna à Abomey. Peu de temps après, on vit appraître en ville de nombreux toxosu, esprits barbus armés d’un petit fouet. Ceux-ci se mirent alors à pourchasser les habitants et le roi parvint à grand-peine à s’échapper. Longtemps, il erra alors avec sa suite d’une région à l’autre, ne découvrant partout que la famine : bien qu’ayant à chaque fois, semé du maïs, la population ne récoltait que des pierres.

    Seul un prince malade, du nom de Homenuvo, était demeuré en ville. Les esprits, dont le nombre avait entre-temps doublé, le firent prisonnier. Il le conduisirent à leurs chefs, qui s’étaient rassemblés sous la direction du Zumadunu, à l’endroit où serait érigé leur sanctuaire. Zumadunu, pourvu de six yeux -soit une paire supplémentaire au front et au menton-, fit savoir au prince que le Dahomey était tout entier promis à la ruine si on n’instituait pas un culte pour lui, fils d’Akaba, comme pour tous les morts atteints de difformité. Terrifié, Homenuvo acquiesça ; et le prince des esprits lui enseigna la manière d’honorer les ancêtres et les dieux. Il lui révéla six cent soixante-six chant à entonner au cours de diverses cérémonies. En outre, il détermina le lieu du nouveau sanctuaire et prédit divers événements, dont la naissance de onze nouveaux toxosu dans la demeure du souverain.

    Après quoi, il libéra Homenuvo, non sans lui avoir annoncé qu’il l’atendrait au même endroit à minuit dans exactement onze jours. Subitement libéré de son mal, le prince rapporta tout l’histoire au roi qui, à son tour, n’hésita pas à répondre à "l’invitaiton" de Zumadunu. Le jour dit, bien qu’encore éloigné du lieu de la rencontre, il entendit un chant sonore accompagné par des maracas. Zumadunu remit sept de ces instruments au roi en lui enseignant à quelle occasion il convenait de faire résonner chacun d’entre eux.

    Enfin, il lui donna trente-trois cauris accompagnés d’autres objets sacrés. Tegbesu n’eut alors d’autre alternative que de consacrer au culte aux toxosu. Il confia les objets sous bonne garde à sa mère, une femme d’Adja qui, en plus des divinités célestes, se mit dès lors à servir les toxosu. Par la suite, quelques-uns d’entre eux firent une nouvelle apparition afin d’informer les habitants d’Abomey que chaque toxosu exigeait n objet consacré ou un sanctuaire destiné à sa propre vénération.

    C’est ainsi que le culte des toxosu fut intégré à celui des ancêtres. Les rois du Dahomey s’en servirent ensuite comme fondement symbolique de leur pouvoir pour consolider ainsi l’expansion de leur royaume : ils imposèrent à tous les villages et villes sous leur juridiction la construction de sanctuaires pour les toxosu royaux en signe d’allégeance au Dohomey.


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  • Désireux de se reposer après avoir créé le monde, Mawu-Lisa, dieu hermaphrodite des origines, confia à ses fils Sakpata et Sogbo le soin de veiller sur son oeuvre. Mais tous deux en vinrent à se quereller. Sakpata quitta alors le ciel pour s’installer sur terre. En tant que fils aîné, il emporta en héritage tous les biens de son père. Son brutal cadet demeura parmi les divinités célestes et, avec le temps, gagna leur entière confiance. Sur terre, Sakpata s’était assuré la position de souverain et comme il disposait de grandes richesses, les hommes se montrèrent d’abord satisfaits de son règne. Mais il ne tardèrent pas à constater avec effroi que la pluie ne tombait plus.

    Ils commencèrent à se plaindre haut et fort auprès de Sakpata. Il les consola jour après jour. Une année s’écoula ainsi bien vite, mais toujours sans la moindre goutte de pluie. Sakpata apprit alors que deux habitants des cieux parcouraient le pays en parlant de quelque chose nommé fa. Il se fit amener les deux voyageurs et leur demanda pourquoi la pluie se faisait attendre. Les deux hommes répliquèrent qu’ils ne connaissaient pas les réponse mais qu’ils pouvaient interroger leur oracle fa. Ils lancèrent donc des graines de plamier et expliquèrent qu’une querelle entre deux frères, tous deux aspirant au pouvoir, était à l’origine du problème.

    Sa solution supposait un accord entre les deux parties. Mais pour ce faire, il fallait que le plus âgé se réconciliât avec le plus jeune et lui fit allégeance. A ce mement, Sakpata eut le douloureux souvenir d’avoir apporté bien des choses du ciel, mais d’y avoir oublié le feu et l’eau. C’est bien trop tard qu’il s’était aperçu à quel point hommes, bêtes et plantes avaient besoin de cette eau à présent détenue par Sogbo. A la question de savoir comment on pouvait encore sauver la terre, les deux hommes lui conseillèrent de rassembler une partie de ses biens terrestres.

    L’oiseau Otutu serait chargé de les emporter au ciel et de transmettre un message à Sogbo. A peine s’était-il envolé que l’oiseau se mit à chanter à pleine voix : "Sakpata a une nouvelle pour toi ! M’entends-tu, So ? Il dit qu’il t’abandonne les maisons, les fils, les pères, les enfants, les mères ! M’entends-tu, So ?" Afin de s’assurer qu’il avait bien entendu et pour voir l’envoyé porteur d’une si bonne nouvelle, Sogbo éclaira la terre en y lançant un éclair. Dans la lumière aveuglante, il reconnut Otutu qui lui apportait les biens et le message de son frère. Là-dessus il fit savoir à Sakpata qu’il avait, en aîné, hérité de tous les biens de leur père, mais n’avait pas su reconnaître la source du vrai pouvoir. L’eau et le feu avaient en effet la force de détruire toutes les richesse terrestres ; voilà pourquoi le pouvoir revenait à celui qui les détenait. C’est ainsi que Sogbo l’emporta sur Sakpata.
    Légende rapportée par les prêtres des divinités de l’orage, qui mettent ainsi en évidence la supériorité de "leur" dieu.)


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  • Selon la légende, Shango fut le quatrième roi d’Oyo, ville située dans l’ouest de l’actuel Nigéria. Pendant sept ans (chiffre mythique), il resta au pouvoir. Son règne fut mouvementé ; on attribue à shango de nombreuses campagnes militaires glorieuses. Ces succès n’étaient pas seulement dûs à son grand courage héroïque, mais aussi à ses dons magiques particuliers : de sa bouche et de ses narines, il pouvait souffler du feu et de la fumée, mettant ainsi en fuite ses adversaires et apprenant à ses sujets à le craindre. Son art magique lui permettait en outre de conjurer la foudre.

    Un jour, il monta avec ses fidèles sur une colline surplombant son palais. En chemin, il décida soudain de tester se "médecine de la foudre" qu’il pensait moins fiable après qu’elle eut été exposée à l’humidité. Assez sûr de son fait, il dirigea la foudre sur son palais. Mais la médecine n’avait rien perdu de son efficacité : une tempête se leva, la foudre tomba du ciel et transforma bientôt le palais en un mur de flammes. La plupart des épouses et des enfants de Shango périrent dans l’incendie. Le coeur brisé, le roi abdiqua. Il quitta Oyo dans le but de se réfugier quprès d’Elempe, son grand-père maternel, dans le pays nupe, situé au nord. Ses sujets employèrent tous les moyens, y compris la violence, pour inciter Shango à rester auprès d’eux. Mais celui-ci attaqua de son épée tout individu qui s’opposa à lui.

    On lui promit de nouvelles épouses afin qu’il puisse avoir à nouveau des enfants, mais aucune promesse ne peut channger sa décision. Il s’en alla donc avec un petit nombre de fidèles et son épouse préférée Oya. Une fois en route, ses compagnons regrettèrent leur décision et firent demi-tour. Même Oya, sa fidèle compagne, perdit courage au moment où le cortège parvint à Ira, sa ville natale. Ainsi abandonné, Shango ne voulut pas poursuivre son chemin tout seul, mais son honneur lui interdit le retour. Il décida donc de mettre fin à ses jours. Sur la façon dont il mit en oeuvre sa décision, il existe plusieurs version. L’une d’elles, à caractère légendaire et mystique, ne le fait pas simplement mourir, mais entrer dans la terre : lorsqu’il s’assit sous un karité à Koso, la foudre et le tonnerre secouèrent tout d’un coup la terre dans laquelle il fut peu à peu et lentement englouti.

    Selon une autre version, moins spectaculaire, il grimpa dans un cotonnier et s’y pendit. C’est à partir de cet instant que Shango fut détrôné et banni du pays car il aurait été un roi rusé, injuste et extrêmement cruel, dont la carrière s’accompagnait de vols, de meurtres, de guerres et autres actes de violence. Il se serait moqué des anciens et aurait raillé les prêtres, se rendant impopulaire auprès de tous. Lorsque la situation devint insupportable, les notables lui envoyèrent une calebasse remplie d’oeufs de perroquet -signe qu’on s’était lassé de lui, mais qu’il pourrait lui-même choisir sa mort. Shango choisit de mourir en exil et se pendit à Koso ; d’où son surnom Oba Koso ("roi de Koso").

    Cette version n’est pas tout à fait invraisemblable puisque les Yoruba éprouvent encore aujourd’hui de l’aversion pour un roi qui dispose d’une magie mortelle : un souverain n’a pas besoin de tels instruments pour régner -à moins qu’il veuille nuire aux personnes de son entourage.

    En tout état de cause, la fin tragique de Shango mit ses anciens compagnons dans un état de panique. Selon la première version, les esclaves du roi se suicidèrent tout comme Oya lorsqu’elle apprit la mort de son époux. D’après la version qui représente Shango comme un tyran violent, les compagnons du roi se rendirent au pays des Bariba (au Borgou) pour se faire instruire dans la fabrication de certaines "médecines" permettant de diriger la foudre sur les maisons de leurs ennemis.

    Lorsque, après le retour, les morts par foudre se multiplièrent, ils furent vite soupçonnés. Pour détourner les soupçons, ils attribuèrent ces catastrophes au roi décédé qui se serait ainsi vengé du tort qu’on lui avait causé. Afin de l’apaiser, il fallait lui offrir des sacrifices. C’est parmi les premiers compagnons de Shango et leurs descendants que s’est recruté le clergé du culte.


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