• La licorne, symbole de pureté


    Les animaux fabuleux ne sont pas tous synonymes de cauchemar, certains représentent la pureté et la grâce : le plus célèbre de ceux-ci, la Licorne, figure dans tous les bestiaires fantastiques orientaux et européens. Animal imaginaire que l'on rencontra sur des blasons, des fresques ou bien encore sur des tapisseries.

    Elle apparaît pour la première fois chez le médecin grec Ctésias qui, au Vème siècle avant J.-C., la décrit comme un âne sauvage et blanc avec une corne au milieu du front. Au IIème siècle avant J.-C., le Physiologus, texte célèbre écrit à Alexandrie qui inspira la plupart des bestiaires médiévaux, la présente sous les traits d'un chevreau sauvage à l'unique corne que seule une vierge peut approcher.
    Dans la tradition grecque de la Bible, on évoque l'Unicorne (monokeros) et les textes religieux qui en sont tirés lui donnent l'apparence d'un cheval blanc à la longue corne torsadée. C'est un animal fantastique puisque protéiforme dans ses innombrables illustrations : elle peut aussi apparaitre comme un rhinocéros, un bovidé, un bouc, voire une créature totalement chimérique (une queue d'oiseau, pas de pattes arrière, celles de devant fourchues et une corne en dents de scie !). Ni sa blancheur, ni sa barbiche ne sont constantes...

    En fait, au Moyen Age, la Licorne a l'apparence qu'on veut bien lui donner. Comme son nom l'indique, on l'identifie avec sûreté grâce à sa corne à laquelle on prête des vertus curatives, protectrices, voire aphrodisiaques. C'est pourquoi la Licorne suscite la convoitise des hommes : nombreux sont les récits narrant la capture d'une Licorne par des chasseurs grâce à l'intervention d'une jeune fille vierge. Elle seule a le pouvoir d'apaiser cette créature farouche et combative, qui vient nicher sa tête dans son giron et s'endort. La scène est parfaitement illustrée dans la bande dessinée de Marc-Renier, Les yeux du marais (série histoire et légendes parue aux éditions du Lombard en 1985).

    Néanmoins son unique corne passait pour avoir un pouvoir de contrepoison universel. Ce que l'on vendait à prix fort élevé au Moyen Age sous le nom de corne de licorne, était en fait la défense du narval, encore appelée licorne de mer, dont on "touchait" les mets afin d'y déceler la présence d'une "éventuelle" substance vénéneuse. La licorne était donc, au Moyen Age, très précieuse pour diverses raisons : elle portait, disait-on, une escarboucle sous sa corne ; son foie pulvérisé et mélangé à du jaune d'œuf combattait la lèpre ; une ceinture faite de sa peau protégeait de la peste et de la fièvre ; des chaussures de la même matière assuraient la santé des pieds ; sa corne, utilisée comme ciboire, neutralisait tout breuvage empoisonné (tout comme la poudre) et empêchait de succomber au haut-mal, c'est-à-dire à l'épilepsie.

    Dans certaines légendes, elle devient furieuse et éventre la jeune fille si celle ci n'est pas vierge ! La Licorne est par contre très douce avec les autres animaux de la forêt. On ne lui connait qu'un ennemi : l'éléphant...

    Ce qui fascine dans le mythe de la Licorne, et ce qui a assuré sa pérennité tout au long de la période qui nous occupe, c'est son ambiguité : dans de nombreux textes et sermons, tels que ceux de Honorius d'Autun au XIIème siècle, la Licorne est une allégorie du Sauveur (sa blancheur évoque la pureté) et sa corne représente la Croix. Le symbole religieux sauve les âmes de même que la Licorne purifie les eaux empoisonnées en y trempant sa corne.
    L'opposition Licorne / Dragon, évoquée au début de l'article, en tant que représentations du Bien et du Mal se vérifie ainsi : le poison prend souvent la forme d'un Dragon, comme dans l'iconographie de St Jean l'Evangéliste (information tirée de Art profane et religion populaire au Moyen Age, p. 321).

    Des poètes laics, comme Richard de Fournival dans son Bestiaire d'Amour au début du XIVème siècle, vont voir en la Licorne la représentation de l'Amant, attiré par l'odeur enivrante et virginale de la jeune fille, puis trahi par elle dans son sommeil. La forme de la corne, souvent caressée par la pucelle dans les illustrations médiévales, est bien assez évocatrice d'ailleurs... Ainsi, à partir du XIIIème siècle, l'allégorie religieuse va dissimuler plus ou moins une image du désir.


  • Commentaires

    1
    Vendredi 28 Août 2020 à 15:39

    Très bon article très complet :)

    Signé la licorne combattante de https://happylicorne.fr/

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