• Peut-on dire que l'homme est libre ?

    Tout homme, en tant qu’homme, paraît se définir au moyen de deux caractéristiques principales : le corps et l’esprit. En effet, d’une part, un homme est, comme toute chose qui existe, un composé de matière doté d’une unité physiologique (il est un organisme vivant). Mais d’autre part, l’homme se distingue des autres choses par le fait qu’il possède une capacité de raisonnement, par le fait qu’il réfléchit et a conscience rationnellement de ce qu’il fait. À cet égard, il semble que cette conscience toute particulière qu’il a de son existence au moyen de sa raison le conduit à dépasser le caractère immédiat de cette existence. En effet, le propre de l’homme est de pouvoir se souvenir des expériences qu’il a vécu (au moyen de la mémoire) et d’être capable de se projeter dans ses expériences futures. La raison est donc un moyen pour l’homme d’avoir un rapport très particulier à son existence puisqu’il la comprend et ne la subit pas aussi directement que s’il ne possédait pas cette capacité d’analyse rationnelle.

    Or, toute la difficulté  tient à ce qu’induit cette analyse. En effet, en se comprenant dans un milieu de vie, l’homme semble posséder le moyen d’être libre et de disposer de son existence. Plus exactement, lorsque l’homme analyse les modalités de son existence, il tente de comprendre le pourquoi des évènements qui lui arrivent et il saisit comment son action résulte de causes qui le poussent et le déterminent. Il peut donc vouloir agir pour orienter ces causes déterminantes dans un sens plutôt que dans un autre. Bref, il résulte de sa capacité d’analyse une forme de sentiment de liberté selon lequel il croit pouvoir faire ce qu’il veut. Tout le problème devient donc de savoir ce qu’il peut face aux causes qui le poussent à agir. Nous ne pourrons dire que l’homme est libre que si nous évaluons sa capacité à s’affranchir des déterminations qui pèsent sur lui, c’est-à-dire si nous parvenons à savoir dans quelle mesure il peut devenir lui-même la cause de son action, indépendamment de causes qui lui échappent. La liberté résulte donc d’une forme de paradoxe rationnel selon lequel l’homme sait à la fois qu’il dépend d’un ordre des choses qu’il ne choisit pas et pense qu’il a la capacité de dominer en partie ou totalement cet ordre pour l’orienter à sa guise.

    1.Nous pouvons d’abord dire que l’homme se sent libre car il comprend ce qui lui arrive, c’est-à-dire qu’il possède une capacité de raisonnement qui lui permet de prendre la mesure des causes qui pèsent sur lui pour savoir comment agir sur elles. Cette intelligence lui permet donc de faire des choix dans son action, de déterminer son corps au moyen de son esprit pour agir librement . En ce sens, la liberté se réalise dans le fait qu’il existe conformément à ce que son esprit a prévu et à ce que son corps vit et expérimente .

    2.Toutefois, le sentiment de liberté qu’il a n’est peut-être qu’une illusion de la raison. En effet, si nous considérons le fait que l’ordre des choses s’impose au corps de l’homme, il semble que le choix qu’il fait ne se fait qu’en fonction de conditions qu’il n’est pas lui-même capable de changer . En outre, le choix qu’il fait lui-même paraît déterminé par ce qu’il a été et par ce qu’il a appris puisque la raison ne lui permet que d’assumer volontairement ce qui s’impose extérieurement. Ainsi, la liberté ne serait qu’une illusion provoquée par l’absence de connaissance précise des facteurs déterminants, c’est-à-dire qu’il n’y a pas de liberté véritable mais seulement une marge d’ignorance de ce qui nous a poussé à faire des choix.

    3. Il semble néanmoins possible de comprendre la liberté autrement que comme une pure capacité de choix indépendamment de toute cause déterminante. En effet, si nous réalisons qu’aucun choix n’est absolu mais se fait toujours en fonction de causes que l’homme subit, nous en venons à redéfinir la liberté comme la compréhension des causes agissant sur l’homme. Cela veut donc dire que la liberté n’est pas une propriété corporelle mais spirituelle selon laquelle l’homme est capable de justifier ce qu’il fait, c’est-à-dire ce qu’on lui impute comme choix . Dès lors, nous pouvons dire que l’homme est libre parce qu’il est le seul être qui ne résume pas son existence à un présent immédiat mais se pense comme responsable de son action et des conséquences de cette action .


  • Commentaires

    Aucun commentaire pour le moment

    Suivre le flux RSS des commentaires


    Ajouter un commentaire

    Nom / Pseudo :

    E-mail (facultatif) :

    Site Web (facultatif) :

    Commentaire :