• Plus de trente égyptologues en quelques années : la malédiction de Toutankhamon a-t-elle vraiment frappé ceux qui ont participé au viol de la dernière demeure du jeune pharaon ? Parmi tous les mystères de l’ancienne Égypte, celui de l’étrange pouvoir des formules rituelles, plus de 3000 ans après, est un des plus discutés…

    Dans une petite salle du musée du Caire, à quelques pas des galeries où se pressent les visiteurs, une dizaine d’homme retiennent leur souffle. Devant eux se tient, emmailloté dans plus de 400 mètres de bandelettes, la momie extraordinairement bien conservée de Ramsès II, le ((Ramsès Ouser-maât-Rê-Sété-pen-Rê)) des anciens Égyptiens, le "taureau puissant qui protège l’Égypte et châtie les pays étrangers, le Riche en âge, le Grand de victoires, l’Aimé d’Amon".

    L'instant est grave. Trois mille deux cents ans plus tôt, Ramsès. Il a été momifié pour son dernier voyage. Maintenant, il est là, avec son profil de rapace, son teint ambré, ses cheveux pâles, les yeux mi-clos, les mains croisées sur la poitrine… Autour de lui, quelques employés du département de chimie du musée, les descendants de ceux qui, trente deux siècles auparavant, servaient le pharaon aux mille temples, aux mille femmes et aux mille enfants. Avec mille précautions, en enlève les bandelettes. Le pharaon en a besoin : comme beaucoup de mortels, cet ancien dieu vivant est rongé de moisissures. Les champignons et les micro-organismes prolifèrent sur sa dépouille sacrée. Avant d’être emmené en France, au Centre de recherches nucléaires de Saclay, pour un traitement définitif au cobalt 60, il faut lui retirer tous les linges qui le recouvrent.

    Deux heures après, l’interminable bande de tissu est presque enlevée. Soudain, les dix hommes voient le bras souverain se relever brutalement, comme dans un geste de menace, et rester pointé vers le ciel…

    Fureur sacrée ou phénomène naturel ? Malgré les déclarations des scientifiques, qui leur expliquèrent que le bras de Ramsès, resté bloqué pendant trente-deux siècles contre la poitrine, avait retrouvé son mouvement naturel dans la chaleur du laboratoire, les employés égyptiens refuseront désormais d’intervenir en quoi que ce soit dans les opérations de manipulation des momies pharaoniques. Pour eux, "Ramsès II n’était pas mort". Il avait commencé à se venger!

    De nouveau, la phrase rituellement inscrite sur les tombeaux de tous les souverains égyptiens reprenait toute sa sinistre actualité. Elle était dans toutes les mémoires : "La mort abattra de ses ailes quiconque dérangera le repos du pharaon."

    La vengeance des pharaons ! Depuis les origines de la civilisation égyptienne, elle plane, comme une menace sourde, au-dessus de tous ceux qui se mêlent de troubler le dernier sommeil des momies, royales ou non. Après la découverte du trésor de Toutankhamon , en 1923, la rumeur de cette vengeance deviendra publique : le monde entier parlera de la main invisible qui semblait avoir frappé une trentaine de ceux qui, de près ou de loin, avait approché la dernière demeure du jeune pharaon.

    Récemment encore, au cours des années soixante-dix, plusieurs égyptologues seront frappés d’un mal mystérieux. Peut-on mettre toutes ces morts sur le compte de la fatalité? Existe-il un lien tragique entre tous ces étranges décès ? Bref, la malédiction des pharaons existe-t-elle ?

    Avant de répondre à toutes ces questions, il convient d’examiner dans quelles conditions cette malédiction a pu être lancée. Car elle existe bien, au moins dans la volonté de ceux qui, il y a trois mille ans, ont tenté de préserver les grands de leur monde du retour à la poussière originelle…

    Chez les anciens Égyptiens, en effet, la magie tenait une place considérable, qui se retrouve dans d’innombrables manuscrits. Magie noire et magie blanche étaient alors une manière naturelle d’envisager les relations entre l’homme et son milieu. Toute à la fois devin, astronome, chimiste ou médecin, le mage égyptien était respecté autant que consulté.

    Pour les mentalités de ce temps, pétries de paganisme plus que de rationalité, le monde n’était qu’un tissu de forces et d’énergies fondamentales qui faisaient réagir l’ensemble des vivants, des morts et même des choses inanimées. Les hommes, passés ou à naître, les dieux, les animaux, les plantes ou les minéraux étaient donc capables de penser. Par conséquent, on pouvait les influencer ou, par l’intermédiaire des mages et des magiciens, on pouvait tenter de traiter avec eux. Cette notion est essentielle pour comprendre la vraie nature de la malédiction des pharaons. S’il était possible d’exercer une quelconque influence sur le monde passé ou à venir, les mages et les prêtres pouvaient donc, au moyen de formules appropriées, protéger un lieu ou un homme contre d’autres hommes.

    Les Égyptiens imaginaient-ils que les tombes de leurs souverains pouvaient être profanés ? Gaston Maspéro, le père français de l’égyptologie scientifique, explique, dans ses Causeries d’Égypte, la manière dont les mentalités de l’époque percevaient les rapports entre le monde visible et invisible :

    "Les vivants se mêlent à ces forces obscures dans le savoir, les heurtent, les repoussent, les appellent, tantôt pour subir des influences mauvaises, tantôt pour recevoir d’elles des bienfaits. Beaucoup sont des divinités ou des génies qui n’ont jamais traversé l’humanité. Plus encore sont des âmes désincarnés, des doubles errants ou des ombres mécontentes, à qui leur condition d’outre-tombe n’a conservé aucun des avantages dont jouissaient pendant leur existence terrestre et que leur misère enrage contre les générations présentes."

    "Ils en veulent à ceux qui tiennent maintenant leur place de les délaisser comme eux-mêmes délaissèrent ceux qui les avaient précédés. Et ils cherchent à se venger de leur négligence en les attaquant à leur insu. Ils rôdent nui et jour par les villes et par les campagnes, quêtant patiemment quelques victimes et, dès qu’ils les ont trouvées, ils s’emparent d’elles par un des moyens à leur disposition. "

    Pour lutter contre les légions de démons malfaisants et implacables, les prêtres peuvent se livrer à des opérations magiques, à des purifications religieuses ou à des sacrifices. Ils peuvent, de surcroît, protéger les vivants par des talismans et par des amulettes : les sections égyptiennes des grands musées du monde entier sont pleins de ces scarabées, de ces colliers et de tous ces objets précieux dont les qualités artistiques enchantent encore nos yeux.

    La plus sûre des défenses contre les forces invisibles restait encore les formules magiques et les exorcismes. Grâce aux papyrus retrouvés dans les fouilles et aux inscriptions des temples, nous en connaissons des milliers, toutes plus poétiques les unes que les autres, mais également toutes plus horribles les unes que les autres. L’une d’elles fulmine ainsi :

    Tombe à terre ! Tombe à terre !
    Ô abomination venue de Sokaris !
    Tu as levé le bras contre l’œil de Râ
    Et tu as capturé le fils d’Horus.
    Cours vers Sekhmet :
    Qu’elle brûle tes chairs,
    Qu’elle tranche tes doigts,
    Qu’elle repousse la plante de tes pieds
    Loin de la terre d’Égypte !…

    Les prêtres poussaient si loin l’art de la malédiction qu’ils s’en prenaient parfois aux dieux eux-mêmes. Plusieurs papyrus magiques nous expliquent par leur menu les moyens de se débarrasser des divinités trop néfastes, avec des détails dignes des grimoires de nos sorcières du Moyen Age.

    Évidemment, pour les Égyptiens qui attachaient tant de prix à la vie dans l’au-delà, le viol des sépultures était un des crimes les plus odieux. Nous savons qu’ils essayaient de se préparer à une mort tranquille par des croyances très souvent affirmées à l’immortalité de l’âme, voire des corps. Pour eux, la mort était une nouvelle "vie", et ils garnissaient les tombes de leurs défunts de tout ce qui pourrait leur être utile pour le "voyage" vers cette nouvelle vie.

    Dès l’ancien Empire (à partir de 2600 ans avant notre ère), on trouve dans les tombes des avertissements à l’égard des voleurs et des pillards. Mieux : on trouve également des menaces contre ceux qui seraient tentés d’effacer les avertissements pour abolir leur "puissance" ! Contre les profanateurs, les châtiments sont variables, mais toujours exemplaires : la malédiction pour l’éternité après une mort atroce.

    Un document funéraire de la XXII e dynastie affirme : "Je m’emparerai de lui comme un oiseau. Je ferai que tous les humains qui sont sur terre craignent les esprits qui sont dans l’Amenti, lorsque les aura terrifiés le fidèle gardien de Nekhen." Cet oiseau de proie de Nekhen sera, par la suite, le symbole même de la vengeance des pharaons…

    Pas question non plus d’effacer le nom du défunt de sa tombe : pour les Égyptiens, "nommer" le pharaon était un moyen de le faire revivre, de le connaître. Marteler son nom, comme cela se fera après quelques règnes particulièrement pesants, c’était l’écarter à jamais du monde des vivants.

    Prudents, les pharaons organisaient eux-mêmes la défense de leurs sépultures, notamment en les regroupant, en leur affectant une garde permanente ou en les camouflant le mieux possible. C’est ainsi que certaines tombes ont pu être conservées jusqu’à nos jours à peu près inviolées. Ce sera le cas du tombeau de Toutankhamon. Les "archives" pharaoniques nous ont transmis des procès mémorables de pilleurs de tombes, où il apparaît clairement qu’il s’agissait déjà, à l’époque, d’une industrie plus que lucrative, où étaient "mouillés" des hauts fonctionnaires, voire des prêtres chargés… de veiller sur leur sépultures !

    À toutes les époques, les trésors enterrés – et on imagine, après l’ouverture de la tombe de Toutankhamon, qui n’était qu’un "petit" pharaon, ce que devait être le trésor funéraire d’un "grand" pharaon comme Ramsès II ! – ont tenté les audacieux et les indélicats.

    Malgré les procès et les condamnations, les pillages continueront, à tel point qu’il faudra évacuer de nombreuses tombes et "regrouper" les momies des pharaons mort dans des sépultures secrètes. Trente-six de celles-là et toutes leurs richesses seront ainsi mises à l’abri dans les environs de Deir el-Bahari. Leur cachette restera inviolée pendant près de trois 3000 ans. Par contre, vers 1870, leur découverte fortuite enrichira un village entier, jusqu’à ce que les égyptologues découvrent à leur tour l’ultime sépulture de souverains dont ils ne pensaient plus jamais trouver la moindre trace.

    Au fil des années, pourtant, la fameuse malédiction ne cessait d’agir. On ne compte plus que les pilleurs de tombes retrouvés morts dans les mausolées qu’ils venaient dévaster : morts accidentelles souvent, due à une mauvaise chute, à l’extinction prématurée d’une torche, mais aussi… à la peur, voire à de bien curieuses maladies. Au XIX siècle, les détrousseurs de pharaons savaient tous ce qu’ils risquaient. Mais le jeu en valait la chandelle…

    On savait aussi, même en Europe, que les momies étaient chargées d’étranges pouvoirs. Le trafic des momies étaient autrefois prospère : les apothicaires utilisaient le corps des aristocrates de l’Empire égyptien pour leurs décoctions ! Les bateaux chargés de convoyer ces momies n’arrivaient pas toujours : l’histoire a retenu l’étrange naufrage du bateau général prussien von Minutoli, qui rapportait une momie trouvée dans la pyramide de Sakkara et qui affectait de se moquer de la "malédiction".

    Le naufrage le plus célèbre du XXe siècle, celui du Titanic, met également en cause une momie. On sait que le géant des mers transportait, avec ses 2500 passagers, de l’or, des diamants et … la momie d’une voyante qui vivait sous le règne d’Aménophis IV. Elle possédait encore toutes les amulettes, dont l’une portait l’inscription fatidique, sous l’effigie du dieu Osiris : "Réveille-toi du sommeil dans lequel tu es plongée. Le regard de tes yeux triomphera de tout ce qui est entrepris contre toi. "

    Trésor précieux, cette momie ne voyageait pas dans la soute, mais près de la passerelle de commandement. Certains n’ont pas manqué de faire remarquer que la malédiction avait peut-être troublé la raison du commandant du Titanic, qui semblait n’avoir tenu aucun compte des icebergs qu’il aurait pu trouver sur sa route et qui paraissait complètement hébété par la catastrophe…

    Faut-il pour autant penser que les prêtres-magiciens de l’ancienne Égypte ont eu recours à des pouvoirs ont résisté au temps ? Et que les formules magiques de ces prêtres garderont encore longtemps leur redoutable efficacité ? Quelques auteurs ont pu le penser et formuler, dès le début du XX e siècle, des hypothèses plus ou moins sérieuses.

    Avec la découverte de la précieuse tombe de Toutankhamon et l’étrange épidémie qui frappera la plupart de ceux qui auront approché la momie du jeune pharaon, ce débat sur la malédiction des anciens souverains de l’Égypte va rebondir et prendre une ampleur internationale.

    Quel est donc cet étrange mal qui a frappé Lord Carnarvon et les compagnons d’Howard Carter ?

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  • Pour le psychiatre, le psychologue et le médecin en général, la conscience est « modifiée » dès lors qu’elle n’est plus entièrement claire, comme dans le sommeil ou même l’état méditatif. Son altération la plus complète est bien entendu le coma, dont le stade le plus profond ou « IV » est constitué d’un état proche de la mort, puisqu’il autorise le prélèvement d’organe, dans certaines conditions précisées par la loi. Tous ces états sont, en règle générale, précisés par l’électro-encéphalogramme (ou EEG). Un certains nombres d’ondes sont identifiées, le niveau « bêta » concernant l’état habituel, le niveau « alpha » concernant l’état méditatif, les niveaux « téta » et « delta » correspondant spécifiquement au sommeil. Le ralentissement de ces ondes peut aller jusqu’au tracé dit « plat », qui définit l’état de « mort cérébrale », mais qui peut aussi faire suite à certaines intoxications comme celles occasionnées par les barbituriques.

    Les altérations de la conscience les plus spectaculaires sont celles liées à la transe ou à l’état « hypnotique ». Un sujet peut être amené dans un état qui n’a aucun rapport avec le sommeil malgré l’apparence : la volonté n’intervient plus, le sujet est susceptible de répondre à toutes les injonctions de l’hypnotiseur, aussi déplacées soient elles. Le somnambulisme, défini par Mesmer et ses continuateurs, est un état encore plus particulier en ceci que le sujet ne paraît plus dans un état de conscience amoindrie comme dans l’état hypnotique mais dans un état d’hypervigilance, qui n’est cependant pas connectée à la volonté et à la conscience habituelle.

    Outre ces causes d’origine psychologique, les altérations de la conscience peuvent être liées à un toxique (prise d’alcool, de haschich ainsi que de toute drogue dite hallucinogène) ou à une maladie. Outre les altérations liées à des crises, comme l’épilepsie, toute maladie grave est susceptible d’entraîner une altération de la conscience, par le biais de la fièvre, mais aussi et surtout par la diminution du volume sanguin, qui n’est plus à même d’assurer une fonction cérébrale normale.

    Les états modifiés de conscience et le « paranormal » :

    Selon une règle assez générale, tous les états modifiés de conscience paraissent susciter des facultés ignorées par l’état de veille, ou du moins les faciliter à un degré inaccoutumé.

    Prenons le cas le plus simple : le sommeil. Nous connaissons tous le « rêve prémonitoire ». Je ne reviendrai pas sur les innombrables cas de la littérature, et préférerai citer une aventure qui m’est personnellement arrivée :

    Une nuit, alors que j’étais reçu à l’étranger, je fais un rêve. Celui-ci me surprend d’emblée par sa tonalité particulièrement brillante. Ma grand-mère (décédée plusieurs années auparavant) est là, assise sur un canapé, immobile, comme une apparition. Je me fais la réflexion, au sein même du rêve : « Claude Lecouteux dit que l’apparition d’un mort annonce généralement un décès. » Je crie alors à ma grand-mère : « Dis-moi qui tu viens chercher. » Celle-ci reste immobile. Je me dis alors : « Lempérière écrit que le sujet n’est jamais dans un état de conscience normale quand il a une hallucination visuelle, or il s’agit d’une hallucination, et je suis dans un état normal. » Puis je me reprends, et constate : « Non, je ne suis pas dans un état de conscience normale, puisque j’ai une énorme pression sur les oreilles. » Je me dis alors : « Par la pensée, je vais repousser cette pression. » J’y parviens et constate que l’apparition s’est effacée. Je me réveille alors. Je suis assez frappé, mais pas vraiment inquiet. Habitué aux prémonitions, je me fais la réflexion que si mort il y a, elle ne devrait pas frapper un membre de ma famille. Je me rendors. A neuf heures, je retrouve l’ami qui m’avais invité. Il me dit aussitôt : « Tu sais ce qui est arrivé cette nuit ? Le mari de ta gardienne est mort, brutalement, à quatre heures du matin ! » Cette femme avait été absolument charmante avec moi, elle habitait au rez-de-chaussée.

    Ce type de cas appartient à un cadre reconnu depuis la plus haute antiquité, sous le nom de « songe ». Macrobe, au 4ème siècle de notre ère, le traitait de « visio » à l’inverse du rêve habituel « visum » ou « somnum ». Les nordiques l’appelaient « cauche-mar » (entité qui réveille le dormeur en l’oppressant), terme qui est entré dans le langage courant pour désigner simplement le mauvais rêve.

    Quand le sujet entre en agonie, on dit souvent qu’il « délire ». Or, paradoxalement, cette altération de la conscience semble amener des facultés inhabituelle :

    La dernière semaine de sa vie, la mère de B. se mit à parler à des gens invisibles. Elle nomme les gens à qui elle s’adresse, tous défunts de plus ou moins longue date. A un moment, elle parle à un certain Georges, un oncle habitant la Sardaigne. Mon amie s’étonne, n’ayant jamais entendu dire qu’il était mort. Deux jours après, celle-ci reçoit son faire-part de décès, survenu quelques heures avant son "apparition". Auparavant, cette femme n’avait jamais eu la moindre hallucination.

    L’état proche de la mort, ou « NDE » est, depuis Moody, un sujet d’intérêt très controversé. Durant cette expérience, le sujet en état de coma peut avoir le sentiment d’observer les choses « de l’extérieur » :

    Le Dr K. me raconte l’histoire survenue à un de ses confrères et amis, quelques semaines auparavant. A la suite d’une intervention cardiaque grave, celui-ci s’est "retrouvé" au plafond de la salle de réanimation. Il observait, dans la plus grande sérénité, les médecins et infirmières s’agitant autour de son corps, changeant les flacons de perfusion et tenant divers propos. Il a pu vérifier par la suite l’exactitude des comportements et des dires.

    La transe n’est pas un état moins surprenant. Prenons un cas classique puisqu’il concerne sainte Bernadette Soubirous, il est relaté par un témoin direct, le Docteur Dozous :

    « La jeune fille est agenouillée en extase devant sa vision. Soudain, le cierge allumé qu’elle tient à la main droite penche vers la gauche... la flamme lèche les doigts. Les proches se précipitent, mais le médecin [le Dr Dozous] les écarte. Il tire sa montre : "Il n’y a pas de stupeur qui résiste à la douleur de la brûlure", se dit-il. Pendant dix minutes, la flamme lèche les doigts sans que Bernadette ne réagisse. Ils sont seulement noircis. Elle sort de son extase et reprend conscience. Le médecin examine sa main, qui est absolu­ment exempte de brûlure. Alors il approche la flamme de ses doigts, et Bernadette écarte vivement sa main : "Pourquoi me brûlez-vous ?" s’écrie-t-elle. La sensibilité normale était revenue. » [Guitton et Antier 1994, p. 150 sq.]

    Cet exemple est d’autant plus intéressant qu’il montre la relation extrêmement fine entre l’état de conscience ou de transe et la sensibilité ou l’insensibilité à la morsure du feu. La chose est connue de longue date puisque le « test de la bougie » est une méthode d’évaluation de la transe dans les cultes afro-brésiliens (Macumba) : on promène une bougie sous le bras de la postulante, si elle brûle, on conclut à la simulation.

    Le music-hall a très largement utilisé les étonnantes facultés des sujets hypnotisés. On se souvient de ces illustrations montrant des sujets se tenant allongés et raides, appuyés sur deux supports, l’un au sommet du crâne, l’autre sous la cheville... Dans l’émission « Mystères » j’avais ainsi assisté à une démonstration où un sujet hypnotisé était couché sur un lit de verre pilé, une moto et son chauffeur roulant sur une planche posée sur eux. Se réveillant, il ne présentait pas la moindre plaie... À l’inverse, on sait qu’on peut susciter par simple suggestion une plaie ou une brûlure au lieu d’application d’un objet à température normale...

    Terminons par le somnambulisme. L’histoire initiale du marquis de Puységur est étonnante (Méheust, 1999, p. 14 sq.). Elle a lieu à partir du 4 mai 1784. Le marquis pratiquait la mesmérisation, une méthode de soin développée par Mesmer. Fort de succès, on lui amène un paysan, Victor Race, âgé de 23 ans. Au lieu de la crise de convulsion salutaire, prévue par Mesmer, le patient tombe dans un sommeil calme et profond. Bien qu’apparemment endormi, Victor manifeste une activité mentale intense, s’exprime sans son patois et sur des sujets qui excèdent ses préoccupations habituelles. La crise étrange dure une heure. Les jours suivants, Puységur obtient de nouvelles crises et note avec stupéfaction : « Quand il est dans l’état magnétique, ce n’est plus un paysan niais, sachant à peine répondre à une phrase, c’est un être que je ne sais pas nommer : je n’ai pas besoin de lui parler ; je pense devant lui et il m’entend, me répond. »

    Interprétation

    D’innombrables explications ont été proposées. J’en reviendrai pour ma part à une des plus classiques et des plus universellement reconnues, les sept « plans du Moi », ou « niveaux du Mental ». On sait que les hindouistes au moins depuis les Veda (il y a près de 3.000 ans), les bouddhistes comme les mystiques chrétiens, comme sainte Thérèse d’Avila ou saint Jean de la Croix, considèrent que notre activité mentale, au sens le plus large qui soit, serait constituée de sept niveaux (chiffre symbolique mais schématique, au dires même de leurs auteurs). Le niveau le plus superficiel est notre conscience claire, le niveau profond, le plan Divin. L’accès à ce plan Divin serait accompagné de pouvoirs psychiques comme (1) devenir aussi petit qu’un atome, (2) devenir aussi grand qu’une montagne, (3) devenir aussi léger que du coton, (4) devenir aussi lourd que du fer, (5) pouvoir toucher n’importe quoi du doigt, aussi loin que ce soit, (6) réaliser tous ses désirs, (7) créer, (8) être parfaitement maître de tous les éléments (cf. Herbert, 1972, p. 188, note 2).

    En d’autres termes, l’approche des plans profonds du Moi se traduirait par des facultés dites « paranormales » de « pouvoir » ou de « savoir » d’une étendue sans rapport avec nos facultés habituelles. L’intérêt de ce modèle est qu’il est interprétable en termes psychanalytiques, une logique occidentale et bien connue du psychiatre. Nous savons que l’activité mentale est bien plus large que la conscience. Mais cette activité est difficile d’accès, au point que nous l’appelons « inconscient » car nous ne savons pas réellement ce dont elle est composée. Freud a mis l’accent sur le refoulement pour expliquer que nous ne puissions pas nous remémorer ces contenus. Jung, un peu plus tard, a parlé d’Inconscient culturel et d’Inconscient collectif, pour théoriser ce qu’il avait remarqué : certaines personnes avaient accès à des mythes qui n’appartenaient pas à notre culture, d’autres pouvaient avoir connaissance de contenus psychiques d’autres personnes (ce que nous nommons télépathie, voyance...). Étendons un peu ces idées : nous avons la conception du Mental.

    Ce que nous avons vu plus haut pourrait être interprété ainsi : dès lors que la conscience est hors-jeu se produit une levée des barrages qui empêchent l’accès aux couches profondes de notre Mental. Le sujet acquiert alors des facultés inaccoutumées, extraordinaires.

    Le saint, le sage et le mystique, par leur travail sur eux-mêmes, auraient accès à d’étonnantes facultés (s’ils le souhaitent, car beaucoup le refusèrent). Le commun des mortels, n’ayant pas fait ce travail, ne pourrait en jouir qu’avec des méthodes artificielles ou surajoutées, à moins que le hasard leur ouvre ces portes...


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  • Le Saint suaire, supposé avoir enveloppé le corps de Jésus-Christ, a été daté au carbone 14, en 1988. Il s'est alors avéré avoir moins de 800 ans. Cependant des scientifiques continuent de défendre son authenticité, "travaux à l'appui".

    Le coup porté au côté droit
    Mesurant 1,10 m sur 4,36 m, le linceul de Turin (il est conservé dans la cathédrale Saint-Jean-Baptiste de cette ville d’Italie) contient les traces d'un corps d'homme, barbu aux cheveux longs, semblant présenter des blessures "qui évoquent les marques d'un crucifié". Certains essaient d'expliquer pourquoi le coup censé avoir tué le Messie a été porté au côté droit, en utilisant une démarche fort peu scientifique et qui "suppose une foi pour le moins aveugle dans l'authenticité de la relique".

    Une nouvelle méthode de datation
    Le Cielt, Centre international d'étude sur le linceul de Turin, a publié, une étude qui, en se basant sur une nouvelle méthode de datation, remet en cause l'âge officiel (800 ans) de la relique qui a été déterminé en 1988 par 3 laboratoires indépendants. Pour ce faire, Raymond Rogers "a comparé le taux de vanilline, un composé chimique présent dans la lignine des fibres de lin, d'une pièce de toile découpée pour la datation de 1988 avec celui de la matière prélevée à l'aide d'adhésifs sur d'autres parties du drap." Il en résulterait que le taux de vanilline sur certaines parties du linceul conduirait à une ancienneté de deux millénaires.
    Le physicien Patrick Berger, membre du Cerclé Zététique considère que Roger "ne fournit pas dans son article les données sources de sa méthode et son degré d'incertitude. Il se réfère aux travaux d'un de ses collègues, Stanley Kosiewicz, sans citer aucune publication. Il compare des prélèvements à des échantillons, donc à des matériaux de nature différente. Et puis, ses équations sont truffées de coquilles". Les chercheurs du Centre de datation sont encore plus sévères. Les datations de 1988 sont tout à fait recevables. Ces méthodes ont "largement fait leurs preuves en archéologie".

    L’enrichissement isotopique
    Quant à l'argument d'un enrichissement isotopique qui aurait "rajeuni" le linceul, il n'est pas normalement observable dans la nature et dire qu'il résulterait de la désintégration d'atomes de deutérium au moment de la résurrection cela relève de l'acte de foi.
    Ce n'est pas non plus l'incendie de 1532 qui a failli détruire le Saint suaire qui aurait pu fausser la datation, car la chaleur ne change pas la répartition isotopique du carbone.

    Le complot
    Autre argument des partisans de l'authenticité : le complot. On aurait substitué des échantillons ou prélevé sur des pièces raccommodées ! Cette hypothèse impliquerait la complicité d'au moins une douzaine de personnes, venant d'horizons différents, dont un cardinal et quatre prêtres. Quant au choix de l'emplacement de l'échantillon, il s'est fait en présence de deux spécialistes des textiles anciens. Il n'y a donc "aucune nouvelle pièce à verser au dossier de la datation de 1988 et, de ce fait aucune raison valable de le remettre en cause."

    Le pollen
    En 1973, Max Frei affirma avoir étudié du pollen prélevé sur le linceul. Les essences végétales dont proviendrait ce pollen prouveraient, selon lui, le voyage du Saint suaire de Jérusalem à Turin via Edesse, Constantinople, Athènes. Des spécialistes des pollens ont indiqué "qu'il était presque impossible de préciser l'espèce végétale à partir de son pollen", il faut alors se contenter du genre. En outre, Max Frei admit que les photos de pollen vu au microscope qu’il a présentées étaient des photos de référence.

    Le négatif photographique
    Un autre argument des défenseurs de l'authenticité du Saint suaire est que le linceul constitue en quelque sorte un "négatif photographique"; et donc que si c’étaient des faussaires qui l'avaient réalisé, ils auraient devancé de plusieurs siècles l'invention de la photographie. En fait, le négatif du Saint suaire ne correspond pas exactement à ce que l'on pourrait attendre (plaies, cheveux, barbe, sourcils apparaissant en blanc). D'autre part, "le principe du négatif était connu des hommes préhistoriques qui dessinaient leurs mains au pochoir sur les parois des grottes". Par ailleurs, le Dr di Costanzo de l'Université de Marseille a réussi à fabriquer, pour le compte de Science & Vie, l'équivalent du suaire à l'aide d'oxyde ferrique, "une méthode simple qui aurait pu être employée au Moyen Age". Le "miracle technique" n'en est donc pas un !

    L’image tridimensionnelle
    Autre argument en faveur de l'authenticité du suaire, celui de la nature tridimensionnelle de l'image. Une étude réalisée en 1984 par des chercheurs américains avec un analyseur d'images montre effectivement un "corps en relief évoquant celui du Christ". Pour Henri Broch, professeur de physique et de zététique à l'Université de Nice Sophia-Antipolis, "en fait, leur analyseur d'image leur a fourni un bas-relief auquel il a bien fallu donner un peu d'épaisseur ! C'est du bidouillage de données..."

    Les traces d’écriture
    D'autres encore prétendent avoir décelé des traces d'écritures autour du visage où l'on distinguerait des mots pouvant former "condamné à mort", le "Nazaréen", "Jésus". Mais l'auteur de ces observations, dans une publication scientifique est "beaucoup plus prudent dans ses conclusions" que lorsqu'il s'adresse au grand public.

    La présence d'éléments sanguins
    Différentes analyses sur les "coulées brunâtres" auraient révélé la présence d'éléments sanguins. Cependant, si ces travaux ont été validés, leur interprétation est contestable. "Aucun d'entre eux n'apporte la preuve décisive de la présence de sang sur le linge". Entre temps, un chimiste, Walter McCrone, a découvert que les fibres colorées contenaient "des particules d'oxyde de fer, autrement dit de l'ocre rouge, mais aussi des traces d'un autre colorant, le rouge de garance. Les épanchements bruns contenaient du vermillon ou sulfure de mercure, un autre pigment utilisé notamment par les peintres médiévaux."

    Le verdict de l’Eglise
    Au Moyen Age, le culte des reliques était très répandu et lucratif... Pierre d'Arcis, un évêque de Troyes (le Saint suaire est apparu à Lirey), en 1377, raconte dans un mémoire la façon dont son prédécesseur "découvrit la fraude et la façon dont ce fameux linge avait été peint par un procédé artistique, il fut prouvé, par l'artiste qui l'a peint, que c'était une oeuvre due à la main de l'homme et non miraculeusement confectionnée ou octroyée". Devant le refus des chanoines de se défaire du linceul, le pape Clément VII donna raison à l'évêque, mais autorisa la "présentation", "à condition que les fidèles soient renseignés sur sa vraie nature". L'historien, Paul-Eric Blanrue estime que "la collégiale de Lirey se serait inspiré de la renommée du saint Suaire de Rome [le voile de Véronique] pour lancer son propre pèlerinage".

    ... et autres arguments
    Cependant les sindonologues (les partisans de l'authenticité du Suaire) n'acceptent pas pour autant les verdicts de la science. Ils ont d'autres arguments en réserve : absence de traces de pinceau, traces de blessure au niveau du poignet plus propice à la crucifixion que la paume de la main, traces de fouet sur le dos, de la couronne d'épines. A chaque fois les scientifiques apportent des réponses. Au bout du compte "l'image du crucifié est trop parfaite pour être vraie".

    Conclusion
    Rarement un objet aura suscité autant l’intérêt de la science, et malheureusement les études les plus "contestables" sont les plus médiatisées et leur conclusion en faveur de l'authenticité du Saint suaire deviennent des dogmes. Les interprétations fondamentalistes des évangiles prennent le pas sur les compétences scientifiques : "il n'est visiblement pas facile de placer sa spécialité scientifique au-dessus de sa croyance."


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  • Depuis plus de 30 ans, des mineurs extraient d'une mine d'argent en Afrique du Sud, la Wonderstone Silver Mine, d'étranges artefacts : des sphères métalliques. On en a déjà retrouvé des centaines. Les sphères ont un diamètre qui varie de 3 à 10 cm. Elles sont composées d'un alliage à base de nickel et d'acier. Cet alliage n'existe pas à l'état naturel. Une ou plusieurs rainures concentriques entourent certaines des sphères, les partageant en deux hémisphères égaux, ce qui éloigne la possibilité d'une formation naturelle. Les étranges trouvailles se divisent en deux sortes: des sphères en métal bleuté moucheté de blanc, et d'autres sont pourvues d'une sorte de coquille. Lorsqu'on la brise, on trouve à l'intérieur une substance spongieuse qui se désintègre au contact de l'air. A l'intérieur de certaines de ces billes, cette substance a l'apparence du charbon.

    Tous les artefacts trouvés ne sont pas purement sphériques. Certains sont plus allongés. Les sphères ne sont pas griffées au passage d'une pointe métallique, ce qui atteste leur dureté. Ce qui commence à devenir plus étrange, c'est que ces sphères ont été extraites d'une couche rocheuse de pyrophyllite (roche tendre de 3 sur l'échelle de Moh. A titre de comparaison, le talc vaut 1 sur cette échelle, le diamant, le plus dur: 10) âgée entre 2,8 et 3 milliards d'années, comme en témoigne les examens aux isotopes radioactifs. Le professeur de géologie de l'université de Potchefstroom, A. Bisschoff told penche sur l'hypothèse que ces sphères soient en réalité des concrétions de limonite. La limonite est une sorte de minerai de fer.

    En 1979, plusieurs de ces sphères ont été examinées par J.R. McIver, Professeur de géologie à l'Université de Witwaterstand de Johannesburg et le géologue Andries Bisschoff. Des experts de la NASA ont également analysé les sphères. A ce jour, nul n'est parvenu à fournir une explication plausible de leur présence au cœur d'une formation rocheuse de plusieurs milliards d'années !

    Des sphères sont exposées au musée sud-africain de Klerksdorp.

    La composition pourrait être d'origine météorique mais la formation n'a rien de naturelle et semble bien artificielle.

    De plus, Roelf Marx, conservateur du musée Klerksdorp, a découvert que la sphère qui est exposée dans une vitrine du musée, tourne lentement sur son axe sans la présence d'aucune vibration extérieure, comme si une énergie qui lui est propre fonctionne toujours après 3 milliards d'années ?

    On parle peu du phénomène, qui mériterait pourtant d'être mieux étudié, ou du moins, dans l'hypothèse que c'est ce qui est en train de se faire, que l'on communique l'entièreté des résultats au grand public. La NASA ne manque pourtant pas de budget et de têtes chercheuses.


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  • (Kundela)

    Depuis les temps de l'Égypte et de la Mésopotamie anciennes jusqu'à nos jours, en Haïti, en Australie ou en Afrique, des gens en pleine santé sont tombés malades et sont morts parce qu'on leur avait jeté un sort. Une abondante littérature existe sur ce sujet.
    Il y a de nombreuses manières de jeter des sorts. On peut façonner une effigie de la victime et la cribler d'épingles ou la brûler; l'effigie peut être en cire, en bois, en argile, en chiffons ou en paille. Des incantations ou des chants peuvent aussi jeter un sort. Des pierres ou des armes « chargées » de magie, ou bien des objets contenant des poudres ou des herbes aux pouvoirs maléfiques, servent au même dessein.
    Mais, quelle que soit la méthode, est-ce le sort jeté qui tue ou l’intime conviction d’une mort prochaine de celui qui en est victime ?
    Les scientifiques se sont penchés sur la question. Que l’on y croit ou non, on ne peut qu’être convaincu de notre méconnaissance du psychisme humain.

    La méthode de « l’os pointé »

    Une méthode bien connue d'exécution rituelle est celle de l' « os pointé », utilisée par les aborigènes d'Australie. La victime ne subit aucun contact matériel, mais son destin est aussi sûrement scellé que si on lui transperçait le coeur d'une lance.

    L'arme dont on le vise peut être en os, en bois ou en pierre. Ce qui compte, c'est la croyance en sa magie. Dans son livre sur les aborigènes d'Australie, publié en 1925, le Dr Herbert Basedow décrit l'effet du rite de l' « os pointé ».

    " L'homme qui découvre qu'un ennemi est en train de pointer un os sur lui offre un spectacle pitoyable. Il se tient hagard, les yeux fixés sur la pointe meurtrière, les mains levées comme pour se protéger des effluves mortels qu'il imagine se déverser dans son corps. II blêmit, son regard devient vitreux, et ses traits se déforment horriblement... Il veut crier, mais les sons s'étranglent dans sa gorge; il ne peut qu'écumer. Il se met à trembler de tout son corps, et ses muscles se nouent involontairement. Il recule en chancelant et s'écroule sur le sol. Pendant un moment, il paraît évanoui, mais, peu après, il se contorsionne, comme en proie à une atroce agonie, et, se couvrant le visage de ses mains, il se met à gémir. Au bout de quelque temps, il semble plus calme, et il rampe jusqu'à son wurley, ou cabane. A partir de cet instant, il dépérit, il s'agite, il refuse de se nourrir et se tient à l'écart des travaux quotidiens de la tribu. À moins qu'un secours ne lui soit apporté sous la forme d'un contre-maléfice, administré par le nangarri, ou sorcier-guérisseur, sa mort n'est plus qu'une question de temps, relativement court. Si le sorcier-guérisseur intervient en temps opportun, il se peut que le condamné soit sauvé."

    La théorie scientifique

    Bien que les méthodes diffèrent, la magie opère si l'on croit suffisamment en sa puissance. Le sorcier doit avoir une confiance absolue en son pouvoir; la victime, être convaincue de son infaillibilité, et la société en général, adhérer à ces croyances. Ce dernier point est particulièrement important.
    On imagine l'effet produit, dans les cultures où la communauté considère la victime comme morte à partir du moment où elle sait qu'un sort lui a été jeté. Il arrive au condamné de cesser de boire et de manger, ce qui concourt à hâter sa fin.
    À ces réactions de la victime devant l'os « pointé » sur lui, on a proposé une possible explication physiologique. Les effets sur l'organisme d'une forte peur sont analogues à ceux d'une colère violente : les glandes surrénales augmentent leur production d'adrénaline, réduisant l'irrigation sanguine dans les parties du corps moins essentielles, pour privilégier les muscles, dont la vie du sujet, par la fuite ou par le combat, peut dépendre.

    L'adrénaline produit cet effet par une constriction du calibre des vaisseaux sanguins dans les parties du corps capables de survivre temporairement avec une moindre irrigation.

    Cet avantage n'est toutefois acquis qu'à un certain prix. La diminution de l'irrigation sanguine s'accompagne de celle de l'apport d'oxygène transporté par les globules rouges. Privés en partie d'oxygène, les capillaires sanguins deviennent plus perméables au plasma sanguin, qui s'infiltre dans le tissu entourant ces vaisseaux. Il en résulte, au cours d'un état prolongé de peur ou de colère, une réduction généralisée du volume de la circulation sanguine.

    Cette réduction entraîne à son tour celle de la pression du sang, et un cycle potentiellement désastreux peut s'installer : la réduction de la pression sanguine affecte les organes qui assurent la circulation du sang, et l'appauvrissement de la circulation réduit encore plus la pression sanguine. Faute d'une intervention, cet enchaînement peut être fatal.

    Le mystère demeure

    Qu'un sort ou un maléfice puisse provoquer de tels désordres est déjà mystérieux en soi, mais plus étonnants encore sont les cas de décès survenant alors que les examens médicaux n'ont révélé ni réduction de la pression sanguine ni accumulation anormale de globules rouges.

    Tel est le cas par exemple d'un Canaque du Queensland du Nord, en Australie, relaté par le Dr P. S. Clarke : « il était sûr de mourir bientôt, car on lui avait jeté un sort; le médecin l'examina et ne décela chez lui aucun problème médical; mais, quelques jours plus tard, il était mort. »
    Il semblerait que, dans les sociétés où les effets d'un maléfice sont unanimement tenus pour assurés, il soit hors de doute que la « lance de la pensée » ait le pouvoir de tuer.

    En 1953, un aborigène nommé Kinjika fut transporté par avion de son Arnhem Land natal (Territoire du Nord), en Australie, jusqu'à un hôpital de Darwin. Il n'était ni blessé, ni empoisonné, ni atteint de maladie connue, mais il se mourait.

    A l'hôpital, il survécut quatre jours dans de grandes souffrances, et il mourut le cinquième, victime d'un os « pointé » sur lui.
    L'homme avait appartenu à la tribu des Mailli, et il avait violé une de ses lois régissant l'inceste. Convoqué devant une assemblée tribale de jugement, il ne s'était pas présenté et avait été condamné à mort par contumace.
    Kinjika avait fui sa patrie, et l'exécuteur de la tribu, le mulunguwa, avait façonné et rituellement « chargé » l'os de la mort, le kundela.

    Le rituel de « l’os pointé »

    L'os peut être celui d'un homme, d'un kangourou ou d'un émeu; il peut aussi être en bois. Il mesure en général 15 à 22 centimètres de long, il est pointu à une extrémité et bien lisse. A l'autre extrémité, une tresse de cheveux est attachée à un trou ou collée avec une gomme provenant d'une graminée, le triodia.

    Le kundela doit être chargé d'une puissante énergie psychique, au cours d'un rituel complexe qui doit être scrupuleusement suivi et dont le secret n'est divulgué ni aux femmes ni aux étrangers à la tribu. Si le condamné s'est enfui, l'arme est remise aux kurdaitcha, les tueurs rituels de la tribu.
    Ces hommes tiennent leur nom des sandales qu'ils portent pendant leur chasse au coupable; elles sont tissées de plumes de cacatoès et de cheveux humains, et ne laissent pratiquement pas d'empreintes.

    Les tueurs se couvrent le corps de poil de kangourou, collé sur leur peau enduite de sang humain, et ils portent un masque en plumes d'émeu. Ils opèrent à deux ou trois. Implacables, ils poursuivent leur gibier humain pendant des années s'il le faut.
    Quand ils ont enfin acculé leur proie, ils s'en approchent à une distance d'environ 5 mètres et le « frappeur », un genou en terre, vise le condamné comme avec un pistolet. Le kurdaitcha lance l'os dans sa direction, en émettant un chant bref et perçant. Puis les chasseurs se retirent, abandonnant leur victime à son malheureux sort. Lorsqu'ils sont de retour dans leur village, les kurdaitcha brûlent le kundela de façon cérémonielle.

    Les aborigènes d'Australie utilisent le kundela dans les cérémonies d'initiation, contre leurs ennemis et contre ceux qui ont violé les lois tribales. Dans ces trois domaines, son pouvoir est redoutable. On ne connaît que peu de cas d'hommes ayant survécu après avoir eu l'os « pointé » sur eux.

    Par contre, les effets funestes d’un sort peuvent immédiatement cesser si la victime s’en croit délivrée. Cela tend à démontrer que ces effets sont bien de nature psychosomatique.


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