• (labyrinthe préhistque de Trojaborg)

    Préhistoire

    La plus ancienne représentation d’un labyrinthe a été trouvée dans une tombe sibérienne datant du paléolithique : il s’agit d’un dédale de sept circonvolutions, entouré de quatre doubles spirales, gravées sur un morceau d’ivoire de mammouth. On trouve aussi des labyrinthes au temps du néolithique, au bord du Danube, près de la mer Egée, en Savoie, en Irlande, en Sardaigne, au Portugal, en Italie (au Val Camonina, il y a 4 000 ans) à Malte ou encore à Belgrade, sur des figurines datant de 7000 ans. Ces tracés sont inscrits dans des carrés ou des cercles, accompagnés de dessins d’ours, d’oiseaux ou de serpents. Sur l’île de Gavrinis, en Bretagne, il a été découvert une galerie avec de multiples embranchements. Les changements de direction sont indiqués notamment par des spirales . Ces tracés labyrinthiques s’inscrivent toujours dans des lieux sacrés.

    Ainsi, d’après Jacques Attali, le labyrinthe s’inscrit non seulement comme un symbole, mais aussi comme le support d’un mythe, voire un mode de communication : un langage avant l’écriture.

    Égypte ancienne

    Le labyrinthe le plus ancien serait attribué, selon Hérodote, à Amménémès III, pharaon de la XIIe dynastie, qui aurait eu pour projet de construire près du lac Moéris (actuel Birket-Karoun), son palais monumental, comportant une suite de 3 000 salles et couloirs sur plusieurs niveaux. Ce labyrinthe fut construit pour glorifier son pouvoir mais aussi pour rappeler aux Égyptiens le nom de leurs douze rois et célébrer la dodécarchie : « Les Égyptiens s’étaient trouvés libres après le règne d’Héphaïstos. Mais, incapables en tout temps de vivre sans roi, ils s’en donnèrent douze, en divisant l’Égypte entière en douze lots(...) Une de leurs décisions fut de laisser un monument commun qui rappelât leurs noms : ceci décidé, ils firent construire un labyrinthe au-dessus du Lac Moéris et proche de la ville qu’on appelle Crocodilopolis ». Ce dernier aurait d’ailleurs inspiré Dédale pour la construction de la prison qui devait enfermer le Minotaure.

    La Pyramide de Hawara possède un véritable labyrinthe, pour accéder au temple funéraire. Selon Hérodote, ce labyrinthe comptait douze cours principales entourées de galeries et de salles. Strabon comptait autant de salles qu’il y avait de nomes en Égypte.

    La légende grecque reprend quelques aspects du mystère égyptien : la mort, la possibilité d’égarement, le fil conducteur, et la notion de non-retour. Mais la comparaison s’arrête là. En effet, autant pour les Egyptiens, le plus important était d’atteindre le centre, autant pour les Grecs, il importait de revenir.

    Symbole d’un cheminement initiatique long et difficile, le labyrinthe est connu de nombreuses civilisations anciennes : les hommes préhistoriques, les Mésopotamiens, les Scandinaves, les Hopis, les Navajos, les Indiens, les aborigènes d’Australie, les Touaregs, les juifs de Palestine (datant de 2000 avant J.C.), les Mayas... En Inde le labyrinthe est représenté sous la forme du mandala, art de tradition ancestrale, symbolisant le destin. Il s’agit d’un cercle sacré, au sein duquel on trouve des divinités bouddhiques. Il représente le mélange entre l’organisation du monde idéal, et le cheminement, long et difficile, de l’homme : le voyage intérieur. De même, en Chine, on trouve des labyrinthes gravés dans la grotte de T’ong T’ing, sous la forme de chemins d’encens dont la consumation sert à mesurer le passage du temps. Ils servent surtout la nuit, lorsque le soleil ne peut éclairer. En Scandinavie, il n’est pas rare de trouver nombre de labyrinthes, construits de pierres de différentes dimensions, afin de construire les murs d’un chemin. La figure de fylfot (svastika sacré) ainsi construite, et fondée sur neuf points (chiffre sacré), peut être trouvée sur des îles isolées. Elle sert pour des danses ou des jeux traditionnels.

    Dans ces différentes cultures, les labyrinthes de pierre ou de gazon présentent toujours un parcours unique avec sortie rapide. Parcourir le labyrinthe, seul ou avec l’ensemble de la communauté, est alors l’occasion d’une introspection. Les méandres symbolisent le cours de la destinée humaine, ses pièges et ses tourments.

    Pendant des millénaires, le labyrinthe a fasciné l’humanité par ses mystères, car un seul sentier mène au but. Des tracés de chemins tortueux ont été taillés dans les parois rocheuses du désert américain et sur les falaises scandinaves. Des dédales ont été taillés dans la tourbe du Pays de Galles et d’Angleterre (comme le Julian’s Bower à Alkborough). Monstres et géants font partie de ce mythe, et les Églises elles-mêmes se sont servies de son symbolisme. Aujourd’hui ils ne sont plus qu’une amusante curiosité, dont l’un des modèles les plus connus est celui de Hampton Court en Angleterre.


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  • Le labyrinthe du Minotaure construit par Dédale se serait situé en Crète, sur l’île du roi Minos ; c’est en effet sur l’ordre de ce roi qu’il fut construit, afin d’y faire enfermer la créature monstrueuse née des amours de la reine Pasiphaé et d’un taureau. Les recherches archéologiques faites en Crète sur les palais minoens, notamment celui de Cnossos, révèlent des constructions étendues, dont le plan d’ensemble est complexe. Le mythe du Labyrinthe pourrait n’être qu’une transposition de cette complexité architecturale ; par ailleurs, les Crétois vouaient un culte au taureau. Étymologiquement, le mot dériverait du terme « labrys » qui désigne une hache, plus exactement une double hache comme celles dont on a retrouvé des reproductions gravées dans la pierre à Cnossos.

    Le mythe du Labyrinthe est une double représentation de l’Homme et de sa condition : il est d’une part la représentation de l’Homme obscur à lui-même, qui se perd en essayant de se connaître. Il symbolise l’âme humaine dans toute sa complexité, en proie au mal (incarné par le Minotaure, être monstrueux). Toute rencontre avec le monstre se révèle fatale. Il représente d’autre part l’Homme face à l’univers : il est perdu, ne sait d’où il vient, où il est, où il va, et cherche à sortir de cet état, c’est-à-dire à trouver les réponses à ses questions.

    Seules trois personnes ont réussi à en sortir selon la légende : tout d’abord, Dédale et son fils Icare. Ils y furent, selon les versions, enfermés par Minos lui-même, le commanditaire de l’ouvrage, qui voulait être certain que son créateur n’en évente pas les plans. Or, la conception était tellement parfaite que l’architecte lui-même était bien incapable d’en trouver la sortie. Il dut recourir à un ingénieux stratagème : fuir par les airs, en s’élevant grâce à des ailes faites de cire et de plumes. Pour d’autres, il fut puni pour avoir donné l’idée du fil à Ariane. Thésée, venu en Crète pour tuer le monstre. Ariane, fille de Minos, s’éprit du jeune homme ; au moment où il pénétrait dans le Labyrinthe, il reçut d’Ariane une pelote de fil qu’il déroula au fur et à mesure qu’il avançait et qui lui permit de retrouver son chemin, une fois sa mission accomplie (le fameux « fil d’Ariane »).
    Le Labyrinthe est ainsi la matérialisation de la question du sens de la vie : l’envol de Dédale et Icare peut symboliser l’élévation de l’esprit vers la connaissance ou celle de l’âme vers Dieu, qui permet de sortir de l’absurdité de la condition humaine. De même, l’amour pour un autre être (Ariane pour Thésée) permet de donner un sens à la vie.

    Cependant, la destinée humaine reste fragile. Ainsi, Icare, que la fougue de la jeunesse grisa, se rapprocha trop près du soleil (symbole de la connaissance, de la lumière, de la vérité) malgré les appels éplorés de son père. La chaleur fit fondre la cire, et le malheureux tomba dans la mer et se noya.
    Quant à Thésée, il quitta la Crète, emmenant Ariane avec lui, mais l’abandonna bientôt sur l’île de Naxos. Selon une des légendes, le dieu Dionysos, la trouvant endormie, en tomba amoureux et l’épousa. Une autre légende raconte que le désespoir d’Ariane fut tel qu’elle se jeta dans la mer. Certains affirment que c’est Dionysos qui avait envoyé un songe à Thésée pour lui dire qu’il voulait Ariane pour lui.
    D’autre part, après avoir fui la Crète, et en arrivant à Délos, Thésée inventa une danse en rond "sur une combinaison de mouvements alternatifs et circulaires" , les uns derrière les autres, autour de l’autel d’Apollon. Cette danse évoquait le fil d’Ariane, les détours du labyrinthe... Elle fut dansée pendant très nombreuses années sur l’île de Délos et à Athènes.


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  • Dans l’histoire du labyrinthe classique européen, on distingue trois époques, dont proviennent trois types de dessins différents : le labyrinthe crétois, le labyrinthe romain et le labyrinthe médiéval.

    Le labyrinthe crétois

    Les premiers exemples connus du motif graphique du labyrinthe étaient gravés sur la roche naturelle, selon un dessin plus simple que celui du labyrinthe médiéval mais déjà bien défini. Ce modèle de labyrinthe a reçu le nom de crétois parce qu’on l’a d’abord trouvé sur des pièces de monnaie crétoises. Il est cependant très antérieur à cette époque crétoise. Il est construit sur une trame spirale de 8 enroulements délimitant sept couloirs. La spirale de 8 enroulements résulte du prolongement replié de chacun des 4 bras de la croix initiale. Ce motif très répandu est encore utilisé aujourd’hui. Il en existe une version rectangulaire, aussi très répandue, mais elle n’a pas de rapport direct avec le labyrinthe médiéval.


    Le labyrinthe romain

    La civilisation romaine a mis au point un modèle particulier de labyrinthe, utilisé principalement sous forme de mosaïques de sol. Ce modèle se retrouve entre autres sur le sol d’une église algérienne datant de 324. Le labyrinthe romain est habituellement à quatre quadrants correspondant à quatre labyrinthes identiques parcourus successivement. Le nombre de couloirs est variable. Il existe en versions circulaires et carrées. Contrairement à la plupart des autres auteurs, je crois que c’est le labyrinthe romain, et non le labyrinthe crétois, qui est à l’origine de l’invention du labyrinthe médiéval.



    Le labyrinthe de Reims (médiéval)

    Le dessin du labyrinthe de Reims semble n’avoir existé pendant l’époque médiévale que sur le sol de la cathédrale de Reims. Le labyrinthe de sol a été détruit en 1778 mais un architecte du nom de Jacques Cellier en avait fait un relevé sommaire autour de 1585. Ce relevé permet d’en connaître la forme générale (qui est octogonale avec bastions), et le trajet (qui est différent de celui de Chartres). La forme octogonale avec bastions était originale au moment de la construction ; par la suite elle a été utilisée ailleurs, mais avec le trajet de Chartres. Le trajet de Reims n’a été retrouvé nulle part ailleurs, sauf dans un manuscrit français des premières années du 15e siècle (d’ailleurs sous forme octogonale avec bastions), dessin probablement copié sur celui du sol de la cathédrale. L’étude du trajet du labyrinthe de Reims et sa comparaison avec celui de Chartres sont grandement facilitées par sa transcription en version « script », c’est-à-dire en version circulaire sans bastions, à la manière des dessins de manuscrits.

    Le trajet du labyrinthe de Reims est peut-être unique dans la tradition médiévale connue, mais il partage avec celui de Chartres certaines qualités rythmiques. L’étude comparative de ces deux labyrinthes m’a amené à deux notions essentielles pour l’étude du labyrinthe médiéval : la notion de sa structure rythmique spécifique et celle du labyrinthe parfait ou canonique.



    En effet, de nos jours, beaucoup de cathédrales en France sont "anonymes", les noms de leurs concepteurs ont été perdus au cours du temps. Alors qu’aux quatre coins du Labyrinthe de Reims se trouvaient quatre personnages représentant les quatre architectes et des inscriptions donnant leurs noms : dans l’ordre Jean d’Orbais qui fit les plans et éleva le chevet, puis Jean Le Loup qui ouvrit les portails Nord, Gaucher De Reims qui commença la façade Ouest et enfin Bernard De Soisson à qui une rosace et les premières voûtes furent attribuées.
    Jean Le Loup qui fut maître d’oeuvre de la cathédrale, l’espace de seize ans et qui commença les portails (nord)
    Jean d’Orbais, maître d’oeuvre de la cathédrale qui commença le chevet Gaucher De Reims qui fut maître d’oeuvre l’espace de huit ans. Il débuta les voussures et les portails (de la façade Ouest)
    Bernard De Soisson qui fit cinq voûtes et ouvrit la rosace ouest. Maître d’oeuvre l’espace de trente-cinq ans.

    Tous étaient représentés avec un attribut de leur profession : l’un tenait une équerre, un autre un compas, un troisième une corde à nœuds servant à mesurer et le dernier dressait l’index comme pour donner un ordre.
    Au centre du Labyrinthe se trouvait un grand personnage que l’on a coutume d’identifier comme Aubry de Humbert, l’archevêque rémois qui décida en 1211 de reconstruire une nouvelle cathédrale à la place de l’ancienne rasée par un incendie en 1210.
    Enfin deux autres personnages, que nous n’avons pu identifier en raison de l’absence d’inscriptions lisibles, se situaient à l’entrée du Labyrinthe. Peut-être étaient-il deux autres architectes désormais voués à l’anonymat.

    Certains historiens ont pensé que le Labyrinthe avait été élevé, non seulement pour sa vocation de chemin de pèlerinage, mais aussi à la gloire des architectes qui ont réussi à dresser, au XIIIème siècle, cette colossale œuvre d’art qu’est Notre Dame de Reims. Et ainsi ces historiens ont fait un parallèle avec le Labyrinthe de Cnossos qui immortalisa lui aussi son créateur, l’architecte Dédale.

    Malheureusement si vous ne trouvez plus le Labyrinthe maintenant c’est parce qu’il a été détruit en 1779 par les chanoines, soi-disant dérangés par les enfants qui jouaient dedans durant les offices.
    Malgré sa disparition il reste la marque de ces géniaux architectes qui ont bâti notre chère cathédrale et il sert aujourd’hui de symbole aux monuments historiques français.


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  • Des nombres et des chiffres !

    Le labyrinthe de Chartres est sans doute le plus grand de France et il s’en fallait de 11 millimètres (sic) pour qu’il mesure 13 mètres de diamètre ! On a frôlé un nombre symbolique qui eut fait frémir plus d’un ésotériste et plus d’un symboliste. Hasard des mesures, ou volonté dirigée ?
    En effet, si l’on retient que 11 millimètres est une erreur ou une volonté liée au tracé du labyrinthe il faut aussi en souligner une autre du même type tout aussi formidable. Nous sommes tout à coté des fameux carrés de Terre et de ciel ayant consigné la naissance de l’édifice. Dans le cas de Chartres, la figure de base dite "carré" est un rectangle s’approchant de la proportion idéale dont les dimensions sont : 16,40m pour 13,99m. Jean Villette ajoute que le carré rectangle est imposé par les bases de l’ancienne crypte où s’appuieront certains ancrages de piliers qui expliqueraient une nécessité incontournable de stabilité. Puis il ajoute que l’usage d’une "table de logarithmes fait ressortir une erreur de 11 millimètres dans le rapport des 2 côtés du carré d’où surgit la totalité de la cathédrale soit 130,20m dans sa longueur et 62,78m dans celle du transept..."
    Et si le labyrinthe avait eu pour clé d’ouverture le nombre 11... et bien il serait étroitement en correspondance avec 666 et 777 ! Et nous nous retrouverions au seuil d’une dimension toute de blanc et de noir dont personne n’ose approcher ni la réalité ni les conséquences !

    Si l’on considère les diamètres du Décumanus et celui de base du tracé d’origine, leur correspondance arithmétique donne la proportion, sans décimale de 6 (décumanus) et 6 (cercle d’origine).
    Et la cathédrale de Chartres se trouve sur ce rapport dans ses dimensions d’envergure : 6 pour la largeur du transept et 7 pour celle de la nef ! On peut encore ajouter que cette proportion "6-7" s’inscrit dans une figure célèbre où un cercle contient un triangle dont la base engendre un carré buttant sur la circonférence du cercle, produisant ainsi le carré dit "doré" qui n’est autre que le rectangle royal produit par une sorte de quadrature insolite... mais bien réelle !

    Toujours une mathématique curieuse : le diamètre du labyrinthe fut prévu pour correspondre au dixième de la longueur intérieure de la cathédrale. Le point central de la figure géométrique par rapport à celui du transept est égal à la longueur des 4 travées du chœur !
    Faisons appel à quelques réflexions verbales, et jouons avec les mots et sur les mots :
    Le centre du périple est un cercle dans lequel nous entrons et qui se trouve orné de 6 lobes. "Entrer dans un cercle" équivaut à être admis dans un groupe, ou un lieu, très fermé... à y être initié pour y être reconnu.
    6 lobes- Nous retrouvons la marque du 6 de la création du labyrinthe, donc nous sommes à son origine virtuelle. Mais plus encore personne n’a jamais remarqué que le mot labyrinthe commence par le son "labi" = labiale = lèvre ! Retour à la naissance mais surtout au passage de la vie, du souffle, du verbe, du mot, du son. Le nombre ici engendre le verbe et réciproquement ! Le cercle spirituel parfait, le lien idéal du créateur à la créature.
    Pour "certains chercheurs" devenus des "chercheurs certains" le labyrinthe est la représentation de l’oreille et de son colimaçon. Et si la solution résidait là. Car le son (souffle et lèvres) n’est rien sans le sens de réception (l’ouïe) et son organe indispensable (l’oreille). Ne dit-on pas que le pavillon auriculaire représente un enfant à la naissance ? S’il s’agissait d’un labyrinthe-colimaçon nous aurions alors la preuve formelle que certaines de ces réalisations seraient l’œuvre d’initiés templiers.

    Lorsque l’on entre dans la cathédrale de Chartres, il suffit de quelques pas pour se trouver face au labyrinthe. Il est là, comme un défi à relever. Tout autour, ses épines veillent dans le silence de la pierre. La rose en son centre sera le trophée de celui qui saura parvenir jusqu’à elle.

    Nos premiers pas, après un court détour, nous conduisent rapidement tout près de la rose. Nous sommes encouragés par cette promesse de succès...

    ...mais voilà que le sentier s’écarte et tourne comme les circonvolutions de notre cerveau. Et nous cheminons sur le côté gauche. Cerveau gauche : l’intellect. Celui qui calcule, qui compte, qui raisonne. Le sentier nous intéresse. Nous poursuivons.

    Nous passons à droite et, là encore, très vite, nous approchons du centre pour nous en éloigner.

    Cerveau droit : premières expériences psychiques marquantes, impressions subjectives, nous prenons conscience d’un monde différent. Mais déjà, nous voulons l’analyser et revenons vers le cerveau gauche.

    Nous cherchons des savoirs et nous tentons d’en faire le tour , intellectuellement. Bientôt, de nombreux concepts jusqu’alors inconnus nous deviennent familiers. Certains, ne voyant pas ce qu’ils pourraient apprendre de plus, n’iront pas plus loin. Et passeront le reste de leur existence à faire des discours et à expliquer la vie aux autres. Stagnation.

    D’autres franchiront ce pont, la connexion entre les deux cerveaux qui se trouve la plus proche de l’Orient. Et ils entreront dans ce monde ignoré de l’intellect où l’on ne peut demeurer qu’après avoir rassasié et maîtrisé celui-ci, en avoir fait un outil et non plus un frein. Dans ce monde nouveau, il faut alors vivre et oser l’expérience et la vivre pleinement. Ici, les discours n’ont pas leur place. L’heure est à l’action : l’action-service envers l’humanité tout autant que l’action-démarche active vers le centre de Soi.

    Mais le sentier s’éternise et, de rose, toujours point ... Et c’est une double circonvolution si longue et si lointaine du centre que tout devient découragement, non plus intellectuel, mais intérieur voire physique : la nuit obscure de l’initié où le vécu perd son sens au-delà de l’idée que l’on peut s’en faire.

    Certains, encore, resteront là : déçus, usés, brisés. D’autres puiseront dans une foi sans objet le courage de poursuivre. Et, retrouvant l’axe du départ, vivront à nouveau le doute dans un ultime détour, comme s’il était trop simple d’avancer vers le cœur. Car c’est bien dans le cœur que nous pénétrons alors, dans la rose dont enfin nous respirons le parfum.

    Fiers d’avoir parcouru ce long périple et d’en avoir franchi avec succès toutes les épreuves, nous croyons être arrivés tandis que, par cette simple analyse, nous fabriquons de toutes pièces le plus subtil et le plus dangereux des écueils de la route. Croyant avoir conquis la rose, nous sommes en réalité enfermés au centre de notre Satisfaction d’avoir maîtrisé nos deux cerveaux et d’avoir avancé avec courage jusqu’au bout du sentier.

    Si nous restons, nous vivrons captifs dans l’illusion d’être libres. Notre orgueil aura alors tout loisir de s’exprimer. Il faut sortir et continuer car le coeur du sanctuaire n’est pas ici. Mais faudra-t-il refaire tout ce chemin et quitter le labyrinthe par l’Ouest, vers le soleil couchant ? Comme une défaite avec le goût amer de l’effort inutile ? Avant de repartir, nous goûtons encore cet endroit et c’est à genoux, le reste de la nuit, que nous prions pour que la lumière apparaisse à nouveau au milieu de nos ténèbres. Alors, si notre coeur est pur dans sa demande, aux premiers rayons du soleil levant, la Lumière se fait enfin.


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  • La victoire et la défaite de Thésée…et le voile des aveugles

    On peut se demander pourquoi l’Eglise n’illustra pas le centre du périple par une scène religieuse ou sentencieuse puisée dans ses propres dogmes. La queste du labyrinthe se résumerait donc au seul combat, fort louable au demeurant, contre la Bête mythique?

    Réponse peu crédible pour l’époque de la construction. Et s’il s’agissait d’une notion, ou d’une leçon plus profondément initiatique: Thésée revient du Dédale, après avoir tué le Minotaure, grâce au fil d’Ariane noué à l’entrée du circuit.

    Mais cette victoire n’est qu’apparente, car Thésée n’a pas compris que la lumière aurait dû éclairer son retour. Ce dernier ne se fait qu’en raison de l’artifice du fil. Il n’a pas assez foi en sa mission, ni en son retour, et n’admet surtout pas l’épreuve symbolique de la mort…

    Mort qui devient, de fait, un meurtre! Il en oublie même celle à qui il doit la vie, Ariane, et l’abandonne sur l’île Naxos. Le retour de Thésée se fait sans changer la couleur de la voile de son bateau (il ne ‘lève pas le voile’), ce qui tue son père Egée! En vérité, Thésée a tout perdu dans cette histoire aux aspects rutilants et victorieux: son honneur de roi-chevalier (en usant d’un subterfuge), ses racines (son père), sa mémoire (la -le- voile) et ainsi toute sa vie évolutive.

    Sous cet éclairage, le symbole de Thésée donne toute son importance au parcours du labyrinthe. Pour la cathédrale de Lyon (St Jean) il en ira du même principe. D’après la tradition, à la Révolution, 3 commissaires décidèrent d’effacer le labyrinthe. Leur vue baissa à l’allure où le dallage sinueux était emporté puis jeté dans la Saône toute proche. A la dernière pierre, les 3 hommes n’y voyaient plus rien. Pris de terreur, les témoins de ce ‘miracle’ s’écartèrent des 3 aveugles, qui avancèrent, en cahotant, vers la rive du fleuve et se noyèrent là où les dalles avaient été précipitées. Peut-être venaient-ils à leur manière de revivre la défaite du Roi Thésée…

     


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